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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 6 petits-enfants.
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15 mai 2025

Au couchant, l'espérance - roman de Gilbert Sinoué

Est-ce un hasard ou une connivence d’éditeurs ?

Lors de ma dernière razzia chez mon libraire préféré, j’ai choisi sur une même table les polars de Melvina Mestre qui se déroulent dans le Maroc de 1952 et la suite des ouvrages de Gilbert Sinoué, ici racontant l’histoire du protectorat de 1912 à 1956, date de son indépendance. Et plusieurs personnages sont cités dans tous ces ouvrages : le maréchal Juin, le pacha de Marrakech El Glaoui violemment opposé au Sultan et enfin l’abominable chef de la police Boniface …

Je suis donc replongée dans l’histoire de ce pays où mes parents ont vécu *de si belles années entre 1932 et 1944, rapatriés en France dans les bagages du Gouvernement Provisoire de la République du général de Gaulle.

En fait, il conviendrait commencer par ce roman de Gilbert Sinoué pour mieux comprendre à la fois le caractère exceptionnel de la relation tissée entre la France, république jalouse de son empire colonial et convaincue de sa supériorité et le Maroc, seule nation africaine qui ne fut jamais colonisée, étant comme une île entourée d’obstacles difficilement franchissables : la mer et l’océan à l’ouest, la barrière des montagnes à l’est …

Mais une contrée particulièrement riche (phosphates, manganèse, cobalt, cuivre, etc …) et donc convoitée – en particulier par les Espagnols et les Français au début du XIXème siècle, mais aussi les Allemands en sous-main puis les Américains dès 1942.

A travers l’intrigue romanesque des personnages, en particulier Hussein Chaoui le journaliste musulman adopté par une famille juive, avec leur fille Léa l’infirmière, ses amis anciens étudiants de la Quaraouiyine , son patron Elias … c’est la description du processus inéluctable d’accession à l’indépendance qui est icidécrit de façon claire.

Une épopée d’où émergent plusieurs figures emblématiques : le maréchal Lyautey et son œuvre particulièrement efficace et respectueuse des traditions et des croyances marocaines comme de la personnalité du sultan, le jeune Mohammed ben Youssef, futur roi Mohammed V, et le vaillant émir Abd el-Krim, vainqueur des Espagnols dans la première partie de la guerre du Rif.

Il est évident que les autorités françaises, à travers la succession de résidents nommés entre le renvoi de Lyautey, jugé trop respectueux de la spécificité marocaine, et le dernier fonctionnaire accueillant le sultan au retour de son exil forcé en mars 1956, n’ont pas ici le beau rôle. Mais le démantèlement de son empire colonial fut bien pire ailleurs qu’au Maroc.

On suit ainsi le combat de ces jeunes gens lettrés et déterminés, qui ont bénéficié d’une formation supérieure et ne supportent plus d’être discriminés au profit de Français médiocres, la distribution de terres à des colons, l’arrogance des ultras …

Quarante quatre années - finalement peu de choses au regard de la civilisation millénaire du Maroc - de présence française jalonnée de pressions, de coups fourrés et de violences contraires aux traités … mais il en reste aussi une solide amitié, ou du moins je veux le croire !

*lire leur histoire à la rubrique "Affaire terminée, j'arrive"

Au couchant, l’espérance, roman historique de Gilbert Sinoué, publié chez Gallimard,334 p., 22€.

14 mai 2025

Le chant des innocents, polar de Piergiorgio Pulixi

Lorsque je découvre une série de polars comportant, comme souvent, un héros attachant, j’ai souvent tendance non seulement à continuer à lire les épisodes au fur et à mesure de leur parution, mais aussi à me procurer le premier opus de la série, afin de mieux cerner la personnalité et les origines dudit héros.

C’est ce que je viens de faire en lisant le premier volume de la série des enquêtes du commissaire Vito Strega. Une histoire particulièrement sanglante et qui donne des clés élémentaires pour comprendre la suite du cycle qui en est aujourd’hui au cinquième épisode, mais ne met pas en scène ici ni les policières Eva et Mara, ni les paysages de Sardaigne.

Mais une plongée dans les ténèbres absolues : une série de crimes perpétrés par des adolescents, des assassinats d’une violence inouïe, dont les auteurs ne cherchent nullement à se cacher : des coups de couteaux, des battes de baseball, des fusillades dans une galerie commerciale, des aspersions à l’acide … La police ne trouve aucun lien, ni entre les victimes, ni entre leurs auteurs, tous des enfants solitaires nourris de jeux vidéo comme la plupart des adolescents de notre temps.

Le commissaire Strega est pour l’heure sur la touche : suspendu après avoir causé la mort d’un de ses collègues, il est astreint à une évaluation psychologique, à laquelle il se plie avec une grande réticence. En réalité, il ne parvient pas à surmonter la rupture avec son épouse, qui ne supportait plus la place prépondérante que tient son métier dans sa vie.

Après chaque nouveau crime, Strega se sent responsable de ne pas comprendre ce qui relie ces meurtres insensés, et le fait qu’il soit suspendu de ses fonctions ne l’aide pas. Et, au passage, le lecteur commence aussi à décoder certains des ressorts du marasme psychologique de ce colosse, ancien militaire, fils d’un amiral et d’une chanteuse de jazz, diplômé de criminologie et auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet … Si lui, le surdoué, ne parvient pas à stopper cette épidémie de meurtres d’adolescents, qui d’autre ?

Un polar haletant, des personnages féminins complexes, une intrigue qui laisse en suspens quelques interrogations …

 

Le chant des innocents – polar de Piergiorgio Pulixi, traduit de l’italien par Anatole Pons-Rumaux, chez Totem (collection poche de Gallmeister) 334 p., 10,90€

13 mai 2025

13 mai 1958 : le putsch d'Alger ... quelques souvenirs d'une époque troublée.

Mardi 13 mai 1958 : tentative de coup d’Etat menée à Alger, conjointement par Pierre Lagaillarde, avocat, leader étudiant et officier parachutiste de réserve (26 ans), des ultras pieds noirs, Léon Delbecque et Lucien Neuwirth proches du général de Gaulle, les généraux Raoul Salan, Edmond Jouhaux, Jean Gracieux, l’amiral Auboyneau, avec l’appui du général Massu et la complicité de Jacques Soustelle et de nombreux hauts gradés et fonctionnaires.

Ce complot a pour objectif de ramener au pouvoir De Gaulle, sans que celui-ci y soit mêlé.

Le 13 mai 1958 est le jour de l'investiture de Pierre Pflimlin, favorable à l’ouverture de négociations pour l’Algérie. 

Profitant à Alger de la manifestation d'anciens combattants, organisée à la mémoire de trois militaires du contingent faits prisonniers par les fellaghas et fusillés en Tunisie, les partisans de l'Algérie française donnent l'assaut au bâtiment du gouvernement général (GG) sous la conduite de Pierre Lagaillarde. Après la mise à sac du GG, les émeutiers nomment un Comité de salut public.

Le général Massu en prend la présidence. Il envoie à Paris un télégramme : « ... exigeons création à Paris d'un gouvernement de salut public, seul capable de conserver l'Algérie partie intégrante de la métropole »

Les députés, qui n'apprécient pas cette intrusion, investissent comme prévu Pierre Pflimlin.

 

Après avoir quitté le gouvernement provisoire en janvier 1946, De Gaulle avait plaidé dans le second discours de Bayeux (16 juin 1946) pour un régime basé sur un pouvoir exécutif fort et condamné le projet constitutionnel de la IVème République, trop parlementaire à son goût.

 

Le 15 mai 1958, le général Salan prononce une allocution devant le comité de salut public : « Vive la France, vive l'Algérie française, vive le général de Gaulle ! »

Le 19 mai, de Gaulle donne une conférence de presse pour dire qu'il refuse de recevoir le pouvoir des factieux d'Alger. Aux journalistes qui s'inquiètent de l'éventualité d'une dictature, il lance : « Croit-on qu'à 67 ans, je vais commencer une carrière de dictateur ? ».

Le 27 mai, de Gaulle annonce qu'il entame le processus régulier pour « l'établissement d'un gouvernement républicain ».

René Coty, président de la République, se résout le 1er juin, dans un message au Parlement, à en appeler au « plus illustre des Français... Celui qui, aux heures les plus sombres de notre histoire, fut notre chef pour la reconquête de la liberté et qui, ayant réalisé autour de lui l'unanimité nationale, refusa la dictature pour établir la République ».

Investi de la présidence du Conseil, Charles de Gaulle s'attelle à la rédaction d'une nouvelle constitution, approuvée par référendum le 28 septembre 1958 avec 79,2% de Oui.

Le 21 décembre 1958, Charles de Gaulle est élu Président de la République par un collège électoral. Succédant à René Coty, il devient le premier président de la Ve République.

 

J’avais douze ans à l’époque, mais je me souviens parfaitement des images diffusées à la télévision : échanges de coups de feu devant le Gouvernement général d’Alger, et du tumulte politique qui régnait lors de cette période troublée : instabilité des gouvernements successifs, guerre en Algérie où combattaient les appelés du contingent (le fiancé de ma sœur était sursitaire mais il n’allait pas tarder à être appelé sous les drapeaux), discussions entre ceux qui souhaitaient mettre un terme au conflit et ceux qui restaient attachés à la notion d’Empire.

J’ai mis du temps à comprendre … encore que ?

Sources : Wikipedia et Herodote.net

12 mai 2025

Sang d'encre à Marrakech, polar historique de Melvina Mestre

Essai transformé !

Je continue mon « trip » de romans historiques marocains. La deuxième enquête de la détective privée Gabrielle Kaplan se situe en 1952, entre Casablanca et Marrakech.

Kaplan a été sollicitée - parce qu’elle est une femme - par le commissaire Renaud pour rassembler des informations sur une série de meurtres étranges : des cadavres dénudés, retrouvés bien en vue aux pieds d’édifices évoquant clairement la puissance de la France, et portant sur le ventre un tatouage identique d’origine berbère : deux prostituées, un médecin, la mère supérieure d’un orphelinat de jeunes filles, un policier … Pour les autorités, il importe que ces crimes ne transpirent pas dans la Presse locale.

Secondée par son adjoint Brahim, ancien capitaine des troupes qui ont combattu vaillamment à Cassino, Gabrielle Kaplan est sans doute plus apte que quiconque pour enquêter sur les lieux de prostitution de Casa et, en particulier le « quartier réservé », Bouzbir.

Elle va y découvrir l’étendue de la misère de ces jeunes filles et femmes, orphelines, femmes répudiées, tombées dans le dénuement et rabattues par des intermédiaires et  bouclées sans pouvoir sortir sauf à heures réglementées de cette sorte de village d’esclaves sexuelles, signalé cependant comme attraction locale dans certains guides touristiques.

Toujours le même mode opératoire, la même signature, mais quel élément commun à ces victimes ? Une piste conduit Kaplan à Marrakech où elle va bénéficier d’informations de la part de son amie chroniqueuse mondaine Yvonne, qui a ses entrées partout.

Une longue investigation qui va la conduire, sur un infime détail, au plus près du « Tatoueur », au risque de sa vie.

Au-delà de la construction implacable de l’intrigue, j’apprécie à nouveau la description du contexte historique de ce nouvel épisode. Ce Maroc des années qui précèdent l’indépendance, où l’on perçoit à la fois les investissements immobiliers réalisés par la France, la présence sous-jacente des Américains, le rôle politique joué par le tout puissant Pacha de Marrakech El Glaoui, le mépris non dissimulé des européens envers les autochtones, les répercussions des événements si proches de l’après-guerre.

Mes parents avaient regagné la Métropole en 1944, mais avaient vécu dans ces paysages magnifiques les premières années de leur mariage. Ma sœur aînée est née à Casa une année avant l’une des malheureuses héroïnes de ce roman … J’ai visité à plusieurs reprises ce pays magnifique.

Vite, vite, je vais me repaître bientôt du troisième épisode publié depuis quelques jours !

 

Sang d’encre à Marrakech, polar historique de Melvina Mestre, publié chez Points, 216 p., 12,90€

11 mai 2025

La dernière chance d'Eléonore, roman historique d'Anne Villemin Sicherman

Neuvième épisode des enquêtes d’Augustin Duroch, artiste vétérinaire, sous la Révolution.

Nous le retrouvons à Metz en février 1794, secondé par son fils Julien, lui aussi diplômé de l’école d’Alfort, dans une région où les exactions de la Terreur montagnarde parviennent de plus en plus évidentes, à travers le climat de suspicion générale et la pénurie des denrées les plus élémentaires.

Le lecteur est comme plongé au cœur d’un tableau de Louis-Léopold Boilly et dans les pages de la très récente Histoire des Girondins. Mais c’est d’un assassinat dont tout le monde parle : celui d’une jeune femme à la langue bien pendue, habitante du village de Goin, fief des Cussange, retrouvée poignardée sur le perron du château. Naturellement, on en accuse Eléonore, puisqu’elle est une ci-devant, la caste honnie des sans-culottes.

Augustin va se démener avec toute son énergie pour disculper sa vieille amie, d’autant plus que son fils et Lou, la fille d’Eléonore, sont éperdument amoureux : voilà au moins une union désormais possible grâce à l’égalité des citoyens – mais à quel prix !

Mais la justice n’est pas neutre. 

Surtout depuis l’arrivée à Metz du sinistre représentant de la Convention en mission, qui tremble lui aussi d’être soupçonné de mollesse dans sa tâche d’éradication des aristocrates. A l’instar de Carrier à Nantes qui fait noyer dans des péniches à fond amovible des milliers de suspects, Duquesnoy vole, rançonne, pille, emprisonne de façon totalement arbitraire tous ceux qui ont le malheur de lui déplaire. Et c’est ce sbire qui va influencer le tribunal devant lequel devra comparaître la douce Eléonore, sous les huées d'un public vengeur ...

Jusqu’au bout, et à l’époque la justice est particulièrement expéditive, nous suivons les investigations d’Augustin et de son fils afin de trouver l’assassin de la Catherine et prouver l'innocence d'Eléonore.

Un tableau réaliste des terreurs d’une époque troublée, où chacun craint d’être dénoncé à tout moment pour une parole maladroite, une rancœur familiale jamais éteinte, la dénonciation d’une transaction opaque sur les biens nationaux, dans une atmosphère de persécution des prêtres et de tous ceux qui commencent à critiquer les dérives de la faction au pouvoir sous n'importe quel prétexte.

Un suspens qui ne faiblit pas jusqu’à la dernière seconde. Et une page d’histoire. Un bonheur de lecture !

 

La dernière chance d’Eléonore, polar historique d’Anne Villemin-Sichermann, publié chez Calmann-Lévy, 456 p., 21,90€

10 mai 2025

Prévention contre l'incendie

Que dit la réglementation ? 

En très bref : l’article L. 129-8 du code de la construction et de l’habitation rend obligatoire l’installation d’un détecteur avertisseur autonome de fumée dans tous les logements.

L’installation du détecteur incombe au propriétaire. Dans le cas d’une location, le propriétaire s’assure du bon fonctionnement du détecteur lors de l’état des lieux.

L’occupant, qu’il soit locataire ou propriétaire, veille à l’entretien et au bon fonctionnement du détecteur (sauf dans les cas cités à l’article R. 129-13 du code de la construction et de l’habitation).

Normalement, tous nos logements doivent donc en être équipés. Placés en hauteur, de préférence dans un couloir et pas dans une cuisine (il hurlerait à raison de 95 décibels chaque fois que votre plat émet des fumées …).

De temps en temps, il émet un « léger » signal pour signifier que sa pile est épuisée … Très désagréable  quand cela se produit à 3 heures du matin, comme très récemment chez moi. Il est donc préférable de tester de temps à autre la charge restante de la pile.

Je me suis donc propulsée sur mon escabeau pour déclipser l’engin (en pleine nuit pour arrêter le couinement) et retirer la batterie … Mais j’ai alors constaté que l’appareil devait être changé tous les 10 ans et que le mien datait de 2014. Il convient donc de le tester régulièrement afin d'anticiper cette manip.

J’en ai donc acheté un nouveau, qui fonctionne sur une batterie au lithium. Mais, mauvaise surprise, le mode d’emploi est entièrement rédigé en anglais. J’ai donc dû faire appel à un aide pour l’installer à nouveau. Ce qui me rassure, c’est que je n’aurai vraisemblablement plus à changer celui-là !

Merci à Jean-Baptiste pour le coup de main ....

N.B. : On trouve ces dispositifs de 20 à 40€ ..., certains étant connectables ...

9 mai 2025

STELLA, polar de Piergiorgio Pulixi

On retrouve ici avec bonheur le duo d’enquêtrices Eva Croce et Mara Rais, avec en plus la stagiaire Clara Pontecorvo (1,98 m au garrot !) et naturellement vite rejointes dans leur enquête par le professeur de criminologie et vice-questeur Vito Strega qui va se réveler le personnage-clé de cette nouvelle affaire.

Cagliari, capitale de la Sardaigne, ses splendides paysages et ses quartiers sordides, rongés par la pauvreté, la violence et le trafic de drogue. Stella, dix-sept ans, est une jeune lycéenne d’une beauté stupéfiante : désirée par tous les hommes, enviée par toutes les filles de son âge. Elle est retrouvée assassinée sur une petite plage, son corps violemment torturé, ses traits déchiquetés à coups de couteau.

Stella est issue d’une famille « dysfonctionnelle », et c’est peu dire : sa mère alcoolique jalouse sa beauté et adepte d’une secte dominée par un prêtre déviant, son père a été emprisonné à la suite de l’accusation par sa mère de l’avoir violée, son frère est incarcéré, son amant est un jeune caïd affilié à la ‘Ngrandheta – à moins que ce ne soit la Camorra …

Seuls protagonistes sympathiques dans son enfer quotidien : un de ses professeurs et surtout sa grand-mère experte en ramendage de filets.

Autant de suspects possibles et de pistes à suivre dans ces quartiers impénétrables. Raison de plus pour mobiliser Vito Strega, cet inspecteur criminologue chevronné qui cependant n’est pas au mieux de sa forme mentale. Et, au fur et à mesure de l’avancement de l’enquête, on en apprend un peu plus sur le passé difficile de cet athlète métis, fils d’un officier supérieur et d’une chanteuse de blues caribéenne.

Trop belle pour vivre dans ce milieu ultra-violent, Stella n’avait qu’un objectif : s’échapper pour vivre indépendante, se libérer de l’emprise de son petit ami violent, partir pour offrir une autre vie à son petit frère autiste … Elle n’en aura pas eu l’occasion.

Une intrigue complexe, mais d’une construction impeccable,  au milieu des ingérences politiques et des luttes de pouvoir au sein des forces de police - éternelle rivalité avec la gendarmerie - avec en prime l’humour carnassier des deux policières aussi différentes que complices.

Des chapitres courts : 118 pour 563 pages, une traduction fluide – mais des passages en dialectes (sarde, vénitien …) un peu lassants – des scènes de violence très cinématographiques : tout pour un page-turner addictif dès les premières phrases.

 

Stella, polar de Piergiorgio Pulixi, traduit de l’italien par Anatole Pons-Reumaux, aux éditions Gallmeister, 563 p., 25,90€

8 mai 2025

8 mai 1945, fin de la guerre en Europe

Le 7 mai 1945, à 2h41, le maréchal allemand Alfred Jodl signe à Reims la reddition sans condition de l’armée allemande. 

 

Staline exigeant que la capitulation allemande se fasse à Berlin, au cœur du Troisième Reich, une nouvelle signature a lieu le 8 mai dans la ville occupée par les Soviétiques en présence de représentants de l’URSS, de la Grande-Bretagne, de la France - représentée par le général de Lattre, désigné par le général de Gaulle - et des Etats-Unis.

 

Les représentants du haut commandement allemand, emmenés par le maréchal Wilhelm Keitel, signent le document qui entre en vigueur à 23h01, heure locale, soit le 9 mai à 1h01, heure de Moscou. La reddition a donc lieu le 9 mai pour les Russes qui la commémorent à cette date, au contraire des pays occidentaux.

Le Royaume-Uni, les États-Unis et l'Union soviétique se sont en effet mis d'accord sur une capitulation totale et inconditionnelle (Bedingungslosen Kapitulation) du gouvernement allemand et du Haut Commandement des Forces allemandes (OKW) tous les fronts, donc la cessation immédiate des combats et non un armistice qui est un acte politique qui nécessite une négociation mais ne marque pas la fin d’une guerre.

 

C’est cet acte que nous célébrons aujourd’hui, 80 ans après et alors qu’une guerre de haute intensité se déroule aux porte de l’Europe et ailleurs dans le monde … 

 

Souvenons-nous des millions de morts, militaires et surtout civils, et retenons notre souffle !

7 mai 2025

La République de Weimar, par Jean-Paul Bled

Trois livres, un même auteur, pour continuer à comprendre le funeste engrenage qui a conduit l’Allemagne vaincue de 1919 à la dictature de 1933 : Histoire de la Prusse (2007), Hindenburg (2020), La République de Weimar (2025). L’auteur, né en 1942, ne désarme pas. Moi non plus.

J’avais déjà souligné dans les deux premiers ouvrages cités, combien son style était accessible même au non-historien, et combien ses analyses m’avaient passionnée. Il en est de même pour ce troisième opus, lu comme un effroyable thriller politique, avec en plus le sentiment que l’histoire peut aussi recommencer …

En effet, la situation après la cessation des combats le 11 novembre est catastrophique pour les vaincus, en dehors même des conditions draconiennes du traité. 

La guerre a été financée par l’emprunt plutôt que par l’impôt, ainsi le colossal déficit des finances publiques génère une forte inflation, la production industrielle et agricole est en chute libre, la réintégration des soldats et des nombreux mutilés dans la vie économique est difficile. Rapidement, la révolution s’allume ici et là à l'instar de ce qui s'est passé en URSS en 1917, elle est réprimée dans le sang. Bien entendu, ce sont les signataires du traité de paix et fondateurs de la république parlementaire installée à Weimar qui en sont rendus responsables, l’armée n’a pas démérité - selon le mythe du coup de poignard dans le dos.

L’instabilité ministérielle est le fruit du système électoral à la proportionnelle intégrale et de la pression exercée par l’exécution des clauses du traité de Versailles par les Alliés dont la France. Drapés dans leur blanche vertu, les partis d’opposition, loin des responsabilités gouvernementales, accusent de tous les crimes les partis de gouvernement qui n’ont pas d‘autre choix que de céder aux exigences des Alliés.

En 1923 : occupation de la Ruhr, attentats, hyperinflation, démobilisation, poids des versements aux veuves de guerre, augmentation des importations, réparations en nature, versement des salaires aux grévistes qui pratiquent la résistance passive … Le gouvernement n’a pas d’autre solution que la planche à billets, qui génère une dévaluation galopante.

Une figure se détache : Gustav Stresemann, indéboulonnable ministre des Affaires étrangères qui va ramener progressivement son pays dans le concert des Nations, négocier des réductions notables des réparations. Après la réforme monétaire, il y aura même une période dite des « années d’or », entre 1924 et 1929, puis viendra la crise mondiale.

Après l’échec de son putsch de 1923, Hitler préfère prendre le pouvoir par la voie des urnes et utiliser les moyens de la démocratie avant de lui tordre le cou.

Le spectaculaire redressement économique attire les investissements étrangers et l’économie allemande retrouve sa première place en Europe, mais sur des bases fragiles. A l’occasion d’une succession de dissolutions malencontreuses et d’élections anticipées, une majorité absolue reste introuvable. Le président Hindenburg, héros de la guerre, se présente au poste de président à la mort d’Ebert et est triomphalement élu. C’est peu dire qu’il est anti-républicain.

Crise surmontée après crise, Hitler et le NSDAP progressent cependant, surtout face à la politique déflationniste du chancelier Brüning : diminution drastique du salaire des fonctionnaires, pression fiscale, réduction des allocations chômage … poussée spectaculaire des partis extrémistes – nazis et communistes.

Hindenburg est réélu en mars 1931 au second tour – Hitler a recueilli 36,8% - mais il rend la politique déflationniste responsable de son ballotage. Le 30 mai 1932, Brüning démissionne, il sera remplacé par Franz von Papen, un anti parlementariste notoire. Le 31 juillet, le NSDAP recueille 37,3% des voix mais Hindenburg ne se tient pas obligé de nommer chancelier ce « caporal bohémien ». Il n’y a pas de majorité absolue mais, ensemble, communistes et NSDAP peuvent bloquer la machine parlementaire.

Grèves générales, émeutes sanglantes, milices d’extrême-droite, la guerre civile menace. Hitler devient incontournable mais ne transige pas : c’est la chancellerie ou rien. Incroyables conciliabules en coulisse, puis nomination d’Hitler le 30 janvier 1933, conformément à la constitution. Le 21 mars, il obtient les pleins pouvoirs : en quatre mois, l’Allemagne a basculé dans la dictature à parti unique. On connaît la suite.

Dans sa conclusion, l’auteur souligne parmi les causes du désastre le scrutin proportionnel et l’émiettement des partis de gouvernement à gauche comme à droite, le rôle funeste de Hindenburg qui installe un régime présidentiel et son hostilité obsessionnelle vis-à-vis des sociaux-démocrates … et pas seulement les conséquences du traité de Versailles.

Bref, un ouvrage clair et passionnant, qui donne à réfléchir … car comme chacun sait, l’histoire ne se répète pas*, mais …

*Friedrich Merz, leader de la grande coalition qui va désormais gouverner en Allemagne, a échoué de 6 voix pour obtenir dès le premier tour l'investiture du parlement. Il est finalement élu chancelier fédéral au second tour ...

 

La république de Weimar, par Jean-Paul Bled, édité chez Perrin, 300 p., 23€.

6 mai 2025

Crépuscule à Casablanca, polar historique de Melvina Mestre

Jouer à reconnaître  les parfums est le dada de Gabrielle Kaplan, ce qu’elle adore faire … et lui est très utile dans ses enquêtes. 

Voilà, entre autres, ce qui nous fait apprécier cette jeune et intrépide détective privée qui exerce dans le Maroc des années cinquante. Et ce n’est pas sans périls.

Je ne pouvais pas rater ce polar court mais dense : le Maroc sous protectorat français, travaillé par les volontés d’indépendance, où les Américains sont très présents et où s’affrontent dans l’ombre les ultras farouchement attachés au maintien de la présence française, les babouzes de diverses obédiences, les truands corses qui trafiquent les cigarettes et les armes, les flics corrompus et les industriels soucieux de conserver leur position dominante et où les partisans de indépendance du royaume n'est pas bien vue.

Car mes parents jadis, de 1932 à 1944, ont vécu dans ce pays les premières années de leur mariage et y avaient de la famille et des amis très chers, pour la plupart rapatriés en France après des émeutes de 1956. Quand ils venaient en vacances en métropole, j’admirais leurs rutilantes voitures américaines. Et puis l’héroïne de cette histoire habite non loin de l’avenue Blaise Pascal, l’adresse de mes parents …

Au-delà de cette réminiscence personnelle, ce polar raconte aussi, de façon très documentée - une Sciences Po ne saurait y déroger - la sourde effervescence politique menée dans ce territoire qui prépare sa décolonisation, les luttes de pouvoir menées entre alliés d’hier après le débarquement américain en Afrique du Nord – l’opération Torch – l’antagonisme entre les généraux Giraud et de Gaulle, l’action ambiguë d’Alphonse Juin, résident général dont l’attitude vis-à-vis de Vichy fut pour le moins opportuniste.

A la fois historienne et journaliste, Melvina Mestre crée ici une série policière passionnante, dont je vais naturellement me procurer rapidement le deuxième épisode.

Crépuscule à Casablanca, polar de Melvina Mestre, édité chez Points, 189 p., 12,50€.

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