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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 6 petits-enfants.
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27 janvier 2025

Emile de Girardin, biographie par Adeline Wrona

Les romantiques sont à la mode en ce moment. J’en veux pour preuve le récent livre de Dan Franck, et la série animée diffusée par ARTE. Toute cette « effervescence » m’a conduite à explorer le parcours extraordinaire de ce magnat de la presse et la carrière politique fantastique d’Emile de Girardin, une figure du XIXème siècle dont j’avais vaguement entendu parler, sans en connaître l’essentiel.

Et c’est époustouflant !

Plutôt Randolf Hearst que Josepf Pulitzer, un peu Bernard Tapie ou Citizen Kane, c’est un infatigable créateur de journaux, devenu investisseur multimillionnaire, entré en politique mais de convictions très éclectiques, ami des grandes vedettes de son temps – Lamartine, Sand, Hugo, Balzac, Litzt, Théophile Gautier, Dumas, Thiers, Emile Boutmy … époux volage de Delphine Gay, femme de lettres exceptionnelle, poétesse et auteure de talent …

Député pour peser sur le régime en place - parfois éphémère - mais jamais ministre, il reste le créateur insurpassé de toutes les innovations qui marquent encore aujourd’hui la presse écrite … à l’aube de son irrémédiable déclin face aux plates-formes numériques.

Autoritaire, colérique, froid, calculateur, mais féministe avant l'heure, ce petit homme – 1,58m – né en 1806 et dont l’influence sur ses contemporains fut démesurée, est aujourd’hui largement oublié, sauf, j’imagine, dans les écoles de journalisme.

Car Girardin a tout inventé : le journal à moitié prix mais à grand tirage, la publicité, les annonces, les publ-ireportages, le roman feuilleton en pied de Une, l’introduction des presses rotatives Marinoni … et au final, l’essentiel de la loi de 1881 sur la liberté de la Presse et de l’affichage.

Il a pourtant difficilement commencé : sa naissance est illégitime et elle constituera pour lui un fardeau ineffaçable, et même sa date de naissance reste floue. Dès le début de sa carrière, il est l’homme à abattre. Il connaît de nombreux duels, et celui qui l’oppose au journaliste Alexis Carrel va lui nuire grandement : les deux hommes sont touchés, mais son adversaire en meurt.

Son crédo est en tous cas immuable, si ses penchants politiques ne le sont pas quand il se déclare « conservateur progressiste » : c’est la liberté de la presse. Pour Emile de Girardin, la liberté de la presse est une force pour le pouvoir, parce que la presse est moins malfaisante quand elle est plus libre. Un concept encore en débat de nos jours.

C’est la raison pour laquelle il fixe le prix de son journal à la moitié de celui de ses concurrents. Car avant « La Presse », lancée en 1836, le journal n’est pas vendu au numéro mais uniquement par abonnement et son prix annuel représente l’équivalent d’un mois de salaire d’un ouvrier.

Autant dire que nul ne peut s’abonner à plusieurs titres. Le journal est alors une marchandise trop chère pour atteindre les masses et achever l’éducation constitutionnelle du peuple, à un moment où la capacité de lecture s’accroît et où les livres restent très chers. Avec ses innovations éditoriales, Girardin casse les reins de ses concurrents … Dès son lancement, « La Presse » double son objectif de tirage soit 20000 exemplaires. Les autres journaux s’alignent.

Bourreau de travail, il œuvre sur tous les tableaux : politique, soutien aux investisseurs et même à des Etats étrangers, milieu artistique, cercles mondains … ses amours sont célèbres avec Marie d’Agoult, la tragédienne Rachel entre multiples autres.

Professeure à la Sorbonne, Adeline Wrona nous livre une biographie à la fois riche et légère, fondée essentiellement sur des correspondances, passionnante de la première à la dernière page : je ne lirai plus désormais un journal de la même manière.

Emile de Girardin, le Napoléon de la presse, par Adeline Wrona, édité chez Gallimard, 256 p., 22€

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