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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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5 novembre 2022

L'expansion (1881 - 1898) par Pierre Guillen

l'expansion

Cet ouvrage fait partie de la collection intitulée Politique étrangère de la France 1871 - 1969 dirigée par Jean-Baptiste Duroselle qui fut jadis l’un de mes professeurs à Sciences Po. Car il n'y a pas que les polars dans la littérature ...

Je l’avais acheté pour le lire « au moment de la retraite » et j’y découvre à présent une masse d’événements éclairant la situation internationale d’aujourd’hui d’un jour tout à fait nouveau.

Cette période fort peu évoquée de nos jours porte déjà en germe certaines tendances lourdes de notre position sur l’échiquier des relations internationales. On y retrouve les effets pervers du système politique de la IIIème République (que le Général a supprimés dans la Constitution de 1958), ses joutes parlementaires répétitives et stériles, le rôle des groupes de pression – en particulier le parti colonial qui évoque irrésistiblement déjà la "Françafrique" - un consensus progressif et largement partagé par les puissances européennes puis en France en faveur de l’impérialisme.

Après la période de recueillement suivant la défaite de 1870, demeure la rivalité acharnée avec l’Angleterre, encore plus forte que la rancœur contre l’Allemagne qui nous a arraché l’Alsace et la Lorraine. La France vient d’être assommée par sa déroute devant la Prusse. Au Parlement, le clivage se fait entre les partisans de la revanche comme Gambetta, et les activistes de l’expansion coloniale comme Ferry. Clémenceau, Grévy sont tout à fait contre. Mais tous ont pour objectif de rendre à la France son image de marque internationale.

Mission_Marchand-itinéraire

Autre tendance lourde de la politique intérieure qui rejaillit sur sa diplomatie : la frénésie du protectionnisme douanier prônée par Jules Méline, qui irrite au plus au point les Anglais partisans du libre-échange.

Une découverte pour moi : la France étant en retard dans la construction d’un outil industriel, l’épargne que son marché intérieur ne parvient pas à éponger s’investit à l’étranger. La France est le second banquier du monde et elle va utiliser ce levier pour obtenir des avantages coloniaux. L’accroissement du solde positif de la balance des comptes provient de l’obtention de concessions de services publics à l’étranger, favorisant les entreprises françaises : BTP, chemins de fer, armements qui permettent d’établir un protectorat économique avant une colonisation pure et simple. Mais pas toujours car les produits français sont souvent trop chers. C’est l’arme financière.

Les groupes d’influence s’activent : la droite monarchiste et l’extrême gauche radicale conjuguent leurs efforts (déjà ?) contre l’expansion coloniale, source de gaspillage et de dispersion des forces face à la menace allemande. Les ultranationalistes plaident pour une alliance de revers avec la Russie.

La politique de la France a pour effet de tendre les relations avec la Grande-Bretagne et l’Italie et de susciter l’appui de l’Allemagne qui cherche à ménager des compensations à la France après l’annexion de l’Alsace-Lorraine. Mais les points de conflits sont nombreux : la Tunisie, le Tonkin, le Maroc, le Congo, Madagascar, la Chine du sud, la Syrie (appelée à devenir une seconde Algérie) et surtout l’Egypte.

 

Gabriel_Hanotaux_1898

On reste médusé devant l’extraordinaire activité diplomatique de la France, sur tous les fronts à la fois, au cours de cette période bruissant du danger d’un conflit entre puissances.

Et pourtant, l’instabilité gouvernementale et la nécessité de réclamer sans cesse des subsides au Parlement où interviennent les lobbys ne favorisent pas l’avancement des projets. Sans compter les inimitiés entre hommes du Quai d’Orsay et du ministère des Colonies : Gabriel Hanotaux (ici à gauche), Théophile Delcassé, Philippe Berthelot

La rivalité franco-anglaise s’illustre principalement en Afrique. La « prise de possession » de Madagascar a particulièrement heurté les Anglais.

La France met en oeuvre tous les moyens pour que l’Angleterre évacue l’Egypte et pour neutraliser le canal de Suez. Elle tente de couper l’axe britannique Le Caire – Le Cap par une Afrique française s’étendant de Dakar à Djibouti, conquérir le Soudan pour capter le commerce de l’Afrique centrale. La France pourrait en effet, au moyen de barrages sur le haut Nil, priver d’eau ou inonder l’Egypte et contraindre l’Angleterre à se retirer.

C’est l’objectif assigné à la mission "Congo-Nil" du capitaine Marchand qui arrive à Fachoda (au Soudan) le 10 juillet 1898 après deux ans d’exploration coloniale et 4500 km parcourus. Idée de la France est de faire de Fachoda un gage pour rouvrir les négociations avec l’Angleterre en position de force. Mais Kitchener arrive bientôt par le Nil avec 3000 hommes …

L’épreuve de force tourne au désavantage de la France contrainte à évacuer la place. Elle a commis plusieurs erreurs : croire en la bienveillance de l’Allemagne, humilier l’Angleterre en la faisant condamner par une conférence internationale sur l’Egypte et l’obliger à se retirer alors que celle-ci tient plus que tout à la sécurité de ses communications impériales.

L’expansion, de Pierre Guillen (1929 – 2019), Premier tome de la collection "Histoire de la politique étrangère de la France" dirigée par Jean-Baptiste Duroselle – Imprimerie nationale (1984).

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