Fiche de lecture établie par Claude.
Une biographie de Konrad ADENAUER
ELLIPSES, éditeur spécialisé dans les ouvrages
universitaires (www.editions-ellipses.fr), vient de publier une biographie de
Konrad ADENAUER, due à Sylvie GUILLAUME, professeur à l’université de BORDEAUX
III. En 250 pages claires et bien écrites, nourries
des récentes recherches allemandes, Sylvie GUILLAUME retrace la vie politique
de ce « bon allemand » devenu un grand européen. Courageux, habile en
politique, jaloux de son autorité, mais surtout lucide, telles sont les traits
essentiels de Konrad ADENAUER.
Courageux, il l’est quand, deux fois dans sa vie, en 1919 puis en 1945, à 70 ans, il se voit confier le destin de sa ville de COLOGNE, quand tout est à reconstruire.
Il stabilise le contexte politique qui permet à son Ministre de l’Economie, Ludwig EHRARD , de déployer l’efficacité de sa
politique économique, clé du « Miracle allemand ». C’est lui qui fait le sacrifice de la souveraineté
économique retrouvée pour fonder, avec Jean MONNET et Robert SCHUMAN, l’ITALIE
et le BENELUX, l’Europe communautaire. C’est lui, pour l’essentiel, qui dégage, au
milieu du débat confus de 1948-49, les équilibres politiques que nous admirons
tant dans la Loi fondamentale de la République fédérale (l’articulation des pouvoirs entre la
fédération et les Länder, la loi électorale, savant mélange de scrutin
majoritaire et de représentation des minorités, le « Kanzlerprinzip »,
qui assure la primauté et la stabilité du Chancelier). ADENAUER est d’abord un chrétien, catholique fervent, mais très attaché à l’entente avec les protestants – au point de faire entrer le
vieux Zentrum exclusivement catholique dans une Union chrétienne démocrate
(CDU) interconfessionnelle -.
Lucide sur le communisme, ADENAUER, contre l’avis de beaucoup de ses compatriotes, notamment le
parti social démocrate SPD, refuse la tentation de la réunification neutraliste
offerte par le Bloc soviétique en 1953, et choisit l’Alliance atlantique.
lAu passage, ce livre fait apparaitre sous un jour peu glorieux quelques protagonistes : les Britanniques, qui, en 1945, se servent de
leur statut de puissance occupante pour faire de la politique politicienne, les
gouvernements français de la IVème République, qui s’accrochent à la « rive gauche du Rhin »
comme en 1923, MENDES FRANCE, qui, en 1954, ne s’engage pas sur le Communauté Européenne
de Défense, et le SPD qui refuse tous les choix courageux sur l’Europe,
l’économie et la défense, attitude qu’il modifiera fondamentalement en 1959,
après son congrès de BAD GODESBERG, devenant ainsi un parti de gouvernement.
Mais oublions les nains pour revenir aux géants, car ce livre montre comment, malgré leurs divergences politiques, DE GAULLE et
ADENAUER ont entretenu une vraie amitié, sans doute fondée sur la reconnaissance
mutuelle de leurs traits communs : le sens politique, l’entêtement, et
finalement l’aptitude diabolique à transformer une défaite en victoire…