Louis Janmot, le Poème de l'âme, exposition au musée d'Orsay

J’étais venue pour voir une micro-exposition des dessins de l’émailleur Paul Soyer, j’ai découvert l’étrange œuvre d’une vie entière : Le Poème de l’âme de Louis Janmot.

Un artiste, peintre et poète à la fois, totalement oublié (sauf de quelques érudits lyonnais je présume) contemporain de Delacroix, Flandrin et Beaudelaire, ami de Frédéric Ozanam et disciple du père Lacordaire (voir son portrait), Louis Janmot suscita maintes critiques, y compris de la part des sommités religieuses alors que tout son travail est marqué de mysticisme et de religiosité catholique.

Louis Janmot (1814 – 1892) est indissociable de son œuvre maîtresse à la fois littéraire (2800 vers) et picturale (18 tableaux et 16 grands dessins au fusain), réalisée entre 1835 et 1881.

Il semble que c'est la première fois que ce cycle soit exposé dans son intégralité.

Elève d’Ingres, le peintre laisse entrevoir diverses influences : le Néoclassicisme, le Romantisme, la Renaissance italienne, les Préraphaélites, le Symbolisme, William Blake, Füssli, Goya …

Totalement à rebours des Impressionnistes de son temps, et donc parfaitement académique selon les critères alors en vigueur.

Le poème de l’âme est une épopée mystique mettant en scène un enfant – toujours vêtu de rose – et son âme-double – toujours vêtue de blanc, à travers les étapes de sa vie, et jusqu’à la séparation et le chagrin de la mort.

Cette fresque, pour laquelle Eugène Delacroix se démena afin qu’elle soit retenue à l’Exposition Universelle de 1855, ne rencontra pas le succès escompté.

Baudelaire se montre très critique sur les sous-entendus philosophiques et sociaux qu’elle renferme (nous avons besoin aujourd’hui d’un support explicatif pour les déceler …).

Car nous restons très dubitatifs sur cet art religieux qui nous dépasse complètement …

Cependant, elle nous aide à comprendre combien, en ce XIXème siècle plein de bouleversements politiques et économiques, la représentation de l’âme prend une importance considérable et combien il est difficile d’incarner une entité immatérielle distincte du corps et ayant une existence au-delà de la mort.

Perfection du dessin, grâce des figures de la peinture florentine, références à la Vierge, paysages magnifiquement rendus … une sorte de contre-projet de « Divine Comédie ».

Intéressant aussi est le fort contraste entre les peintures du premier cycle, et les grands dessins au fusain du second : contrées dangereuses, cauchemar, dangers de l’inconscient.

Un cheminement totalement inattendu au cœur d’une œuvre considérable, qui ne rencontra pas la faveur du public … malgré un réel talent et une absolue persévérance.

Louis Janmot, Le Poème de l’âme, exposition au musée d’Orsay, 1 rue de la Légion d’honneur Paris 7^ème, jusqu’au 7 janvier. Ouvert de 9h 30 à 18h sauf le lundi.

Comments

[Jauneyris]

Merci pour cet intéressant reportage. Agréable journée