HYPOTHERMIE, polar d'Arnaldur Indridason
L'Islande n'exporte pas que des cendres : elle se vit aussi à travers ses paysages fantastiques et glacés, ses mille et un lacs gelés, ses chalets d'été (?), ses romans d'Arnaldur Indridason.
Le commissaire Erlendur, qui vit toujours (mais mal) avec la culpabilité de la perte de son petit frère dans le blizzard alors qu'il n'avait que dix ans, continue à se passionner pour les affaires de disparitions non élucidées, même très anciennes. il va jusqu'à entreprendre des investigations très personnelles, pas du tout officielles, se fiant à son instinct. Il est vrai que sur une île, quand on est certain qu'une personne adulte n'a pris ni l'avion ni le bateau et qu'on ne trouve en trente ans nulle trace, il y a de quoi se poser des questions. Suicide ? Mauvaise rencontre ? Erlendur ne se résout pas à laisser les familles dans l'angoisse, il sait trop ce que c'est.
Ici, il s'agit pourtant d'une affaire simple : l'épouse d'un médecin, Maria, perturbée par la disparition de sa mère Léonora morte d'un cancer deux années plus tôt et avec laquelle elle vivait depuis l'enfance une relation plus que fusionnelle, est retrouvée pendue au bord du lac de Thingvellir. Là où, alors qu'elle avait dix ans, elle a assisté à la noyade accidentelle de son père. Rien que de bien classique, mais Erlendur est alerté par la meilleure amie de Maria, qui lui remet une cassette : celle d'une consultation de Maria chez un médium. Maria était en effet persuadée que sa mère lui adressait des signes de l'au-delà.....elle disait l'avoir aperçue. Elle voulait - ou croyait pouvoir - la rejoindre, malgré sa grande peur du noir.
Parallèlement, deux dossiers de disparitions vieilles de 30 ans sont sur le point d'être classées. David, un jeune lycéen sans histoires et Gudrun, une étudiante en biologie. Rien ne relie ces deux disparitions, déclarées à quelques semaines d'intervalle, sauf qu'aucune trace des jeunes gens, qui ne se connaissaient pas selon leurs proches, n'a été trouvée nulle part....
Erlendur vieillit bien. Il a des rapports désormais apaisés avec sa fille Eva Lind et son fils Sindri. Pas au point toutefois de revoir sans agacement son ex-épouse Halldora, malgré la demande insistante que présente Eva Lind. Mais il progresse dans l'analyse des causes qui ont amené sa rupture familiale, sa fuite, son silence de tant d'années, aggravé par l'attitude intransigeante de sa femme, qui n'a rien compris à leur histoire et a aussi coupé les ponts.
La question centrale de ce roman est bien la responsabilité que les parents ont vis-à-vis de leurs enfants. Notre capacité à leur pourrir la vie, de notre vivant et au-delà de notre mort. pour moi, après la "Femme en vert", l'un des meilleurs romans de cet auteur.
Hypothermie (Hardskafi), par Arnaldur Indridason, traduit de l'islandais par Eric Boury - Editions Métaillié - 296 p. 19€