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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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6 février 2010

En mémoire du 6 février 1934

Pourquoi célébrer le 76ème anniversaire de cette triste journée, me direz-vous ?
Pourquoi pas !
En référence avec l'ambiance délétère qui règne en ces temps de campagne électorale, pour se souvenir qu'à une époque où l'internet n'existait pas, mais où les journaux n'hésitaient devant aucune provocation verbale ni caricature raciste d'une violence inouïe, où les ligues d'extrême-droite tenaient le haut du pavé alors justement qu'Hitler venait de prendre démocratiquement le pouvoir dans un pays réputé pour son son sérieux....
6_f_vrier_1En souvenir aussi du brave Colonel de La Rocque, qui, s'il ne choisit pas De Gaulle tenta en vain de convaincre le Maréchal de gagner l'Afrique du nord, monta le réseau de résistance Klan en liaison avec les Anglais, fut arrêté et déporté....
En 1934, mon père avait 24 ans et était proche des Croix de Feu. S'il n'avait pas été au Maroc, nul doute qu'il se serait trouvé place de la Concorde pour scander, coude à coude, "A bas les voleurs !" et de bonne foi...
Mais, comme personne ne rappelle le déroulement de ces journées d'émeute, revenons un peu en arrière :

6_f_vrier_3" Le 6 février 1934, Édouard Daladier présente à la Chambre des députés son nouveau gouvernement. C'est le prétexte à une violente manifestation antiparlementaire. Le changement de gouvernement fait suite à la découverte, un mois plus tôt, du cadavre d'un escroc, Stavisky. L'opinion publique soupçonne - à tort - les ministres et les députés d'avoir trempé dans ses combines. Sa méfiance est exacerbée par l'annonce de la mutation du préfet de police Chiappe, suspect de mansuétude à l'égard des «ligues». Depuis le 9 janvier, treize manifestations ont eu lieu à Paris. Tandis que la droite tente d’utiliser l’affaire Stavisky pour remplacer la majorité issue des élections de 1932, remportées par le Cartel des gauches, l’extrême-droite exploite ses thèmes traditionnels : antisémitisme, xénophobie, hostilité à la franc-maçonnerie, antiparlementarisme.

Pour la gauche, le déplacement de Chiappe est lié à son implication dans l’affaire Stavisky, tandis que la droite dénonce le résultat d’un marchandage avec les socialistes : départ de Chiappe contre soutien au nouveau gouvernement. Le 6 février, plusieurs manifestations ont lieu simultanément. Les ligues d’extrême-droite, qui jouent un rôle très important dans l'entre-deux-guerres, notamment lorsque la gauche est au pouvoir, ce qui est le cas depuis les élections législatives de 1932, forment plusieurs cortèges.

Parmi les principales ligues fascisantes présentes le 6 février, la plus ancienne est l’Action française. Fondée à la fin du siècle notamment par Charles Maurras (60 000 membres), elle a pour but de renverser la République et de restaurer la monarchie. Elle s’appuie sur les Camelots du Roi, qui, malgré des effectifs assez limités, sont très actifs dans la rue. De fondation plus récente (1924), les Jeunesses patriotes, comptent 90 000 membres dont 1500 font partie des« groupes mobiles ». Créées par Pierre Taittinger, député de Paris, elles entretiennent des rapports étroits avec des hommes politiques de droite, et comptent dans leurs rangs plusieurs conseillers municipaux de la capitale. Quant à la Solidarité française, fondée en 1933 par le parfumeur François Coty, elle est dépourvue d’objectif politique précis et ses effectifs sont moins élevés.

Les Croix-de-feu, association d’anciens combattants, ont élargi leur recrutement à d’autres catégories sous l’impulsion de leur chef, le colonel François de la Rocque. Les Croix-de-feu s’apparentent à une ligue, la première en nombre d’adhérents. Elles aussi sont dotées de groupes de combat et de défense. La Fédération des contribuables, dont les dirigeants ont des objectifs politiques proches de ceux des ligues, appelle à manifester dès le mois de janvier. Les puissantes associations d’anciens combattants appellent aussi à la mobilisation le 6 février. La plus importante d’entre elles, l'Union nationale des combattants (UNC), dont les idées sont proches de la droite et qui est présidée par un conseiller municipal de Paris, ne compte pas moins de 900 000 membres. Mais l'Association républicaine des anciens combattants(ARAC), satellite officieux du Parti communiste français, appelle également ses troupes à défiler le 6 février, bien que sur des mots d’ordre différent.

6_f_vrier_2Les ligues de droite et d’anciens combattants appellent donc à manifester le jour de l'investiture d’Edouard Daladier, place de la Concorde, en face de la Chambre des députés. Au total 30 000 manifestants dont une bonne majorité d'anciens combattants. Ils crient : « À bas les voleurs ! » et réclament davantage de civisme, d'honnêteté. À l'appel du colonel de La Rocque, les Croix-de-feu se dispersent rapidement. Bien que proches du Palais-Bourbon, siège de la Chambre des députés, ils se refusent à occuper celui-ci. Leur dispersion rend vaine toute possibilité de renverser le régime par la force. Mais autour de la Concorde, la manifestation dégénère. Des milliers de militants en armes tentent de marcher sur le Palais Bourbon. La gendarmerie mobile tire. Les affrontements se prolongent pendant la nuit. Quinze manifestants et un policier sont tués. On compte 1435 blessés.

Dans un premier temps, le président du Conseil Édouard Daladier, porté au pouvoir par la majorité socialiste et radicale élue en 1932, doit céder la place à l'ancien président de la République Gaston Doumergue. Dans le nouveau gouvernement entrent Édouard Herriot et les chefs de la droite battus deux ans plus tôt, dont André Tardieu. La gauche parlementaire dénonce dans la manifestation du 6 février une tentative de coup d'État fasciste. Elle appelle au rassemblement des forces progressistes. Trois jours plus tard, une contre-manifestation à laquelle participent les socialistes et les communistes dégénère à son tour et fait 4 morts et de nombreux blessés. Les militants socialistes et communistes croient voir dans les émeutes du 6 février et le changement de gouvernement une tentative de coup d’État d’extrême-droite. Ces militants poussent leurs chefs à s'unir pour faire front à la droite et gagner les prochaines élections législatives.

Dans la nuit, Daladier prend les premières mesures pour obtenir le rétablissement de l’ordre public (il envisage notamment d'instaurer l'état de siège). Mais le lendemain, ses consignes sont peu suivies par la justice et la police. De plus, il enregistre la défection de la plupart de ses ministres et de son parti. Il se résout finalement à démissionner. C’est la première fois qu’un gouvernement doit démissionner sous la pression de la rue. La crise se résout finalement avec la formation d’un nouveau gouvernement sous la présidence de l'ancien président de la République Gaston Doumergue rappelé par Albert Lebrun, ce dont les ligues semblent se contenter. Qualifié de gouvernement d’«union nationale», il regroupe surtout les principales figures de la droite parlementaire (André Tardieu, Louis Barthou, Louis Marin), même si plusieurs radicaux ou le maréchal Pétain en font également partie.

La gauche interprète les événements du 6 février comme la preuve d’un complot fasciste. Les socialistes et les communistes contre-manifestent le 7 février. Les incidents qui les opposent aux forces de l'ordre font neuf victimes. Le 12 février, la CGT (socialiste) et la CGTU (communiste) décident d’une journée de grève générale et la SFIO et le Parti communiste appellent à une manifestation parisienne qui n’a pas vocation à être commune mais voit pourtant les deux cortèges se mêler à l’initiative de la base. Cette journée marque donc un premier et timide rapprochement entre socialistes et communistes. Elle porte en germe l’union antifasciste entre les deux partis marxistes, ennemis depuis 1920, qui a abouti en 1936 au gouvernement de Front populaire, composé de radicaux et de socialistes avec le soutien communiste."

 

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