Le premier principe, le second principe
Par Serge Bramly, chez J-C Lattès. (22 €) : Une critique de Claude.
On a tremblé cet automne : des rumeurs donnaient le
très pâlichon « Traitre » de Dominique JAMET pour le prix
Interallié ; nous avons dit ce que nous pensons de ce livre écrit à l’eau
de rose, qui réussit à faire de la plus terrible des histoires un tissu de
platitudes. Mais non, les jurés de l’Interallié ont résisté, et ils ont élu un
bon livre, un de ces bouquins que l’on a du mal à lâcher le soir, qui réduisent
encore les courts trajets du TGV, ou font oublier les angoisses dans ces avions
qui n’amerrissent pas toujours si bien.
Disons-le aussi : c’est un livre plein de petits
défauts, à commencer par les fautes d’orthographe et de syntaxe. A propos,
pourquoi les livres français sont-ils devenus des horreurs
orthographiques ? Parce que les correcteurs sont trop chers ? Ou
parce qu’il ne s’en trouve plus, dans ces générations fauchées par les ravages
de la « Méthode globale » ? Il y a aussi des bêtises agaçantes,
des erreurs de documentation sur l’Etat : le « confidentiel
défense », tenu pour un haut degré de secret, alors qu’il est accessible à
tout fonctionnaire, un préfet qui rédige
lui-même un discours de remise de décoration, et qui se fait payer pour être
laudatif, deux choses aussi invraisemblables qu’ un « oranger sous le
ciel irlandais ». Enfin, des longueurs dans l’avant-dernière partie.
Certes l’auteur veut nous faire partager l’ennui et la médiocrité du
« Boulevard MORTIER », siège de nos ineffables services secrets, où
les officiers font des réussites sur leur vieil ordinateur, mais il y parvient si bien qu’on s’ennuie
ferme vers la page 400.
Voilà pour les nuances ; mais oublions-les, pour
retenir que Serge BRAMLY est un écrivain qui sait écrire. La première partie est
parfois éblouissante, notamment la très troublante agonie de la Princesse dans
le souterrain de l’Alma, ou son « Royal Wedding », dont la
retransmission télévisée fascine, partout en Europe, les protagonistes,
inquiétants ou ridicules, de ce récit.
En tout cas, souhaitons une longue et belle carrière à ce
roman, qui fera un très bon film assez vite.
[1] Nota archéologique : site historique du Ministère des Finances, avant que le Sphynx n’exile les maîtres de la France dans le XIIème