In memoriam Thierry S.
Je reviens sur une émouvante cérémonie à laquelle nous avons participé, Claude et moi, mercredi après-midi, en la chapelle protestante de la rue Madame. En vingt ans de présence dans ce quartier, c'était la première fois que nous y pénétrions, pour rendre hommage à Thierry S., notre voisin du second étage, qui vient de mourir paisiblement. Et ainsi, nous avons appris une foule de traits de cet homme, toujours tiré à quatre épingles, un sourire plein de bonté aux lèvres et dont on percevait aussitôt le regard bleu, rieur. En fait, nous l'avons vu pour la première fois alors qu'il venait de prendre une préretraite d'une entreprise de métallurgie. Mais c'était là sa seconde carrière. Il avait été un courageux officier, engagé très jeune dans les Forces Françaises libres, participant à la bataille de France, puis l'Indochine, l'Algérie. Nous avons découvert qu'il adorait le chant, avait toujours conduit des enfants au sein du mouvement scout, qu'il était particulièrement aimé de ses hommes - ceci dit par le général Morillon lors de l'éloge de l'absent. Rien ne laissait supposer ce passé, tant la discrétion de ce couple était grande. La cérémonie n'avait en fait rien de triste. Thierry S. avait lui-même choisi les textes de la Bible qui furent lus par ses fils et certains de ses petits enfants. Comme quoi, l'isolement des villes, sous le couvert d'une discrétion qui n'est souvent qu'indifférence, nous conduit à ignorer la valeur de personnes que nous cotoyons chaque jour. Est-ce un bien ?