Jo, Zette et Jocko, l'intégrale par Hergé
Quelle heureuse initiative que de publier en un volume l’intégrale des aventures de Jo, Zette et Jocko … et quelle bonne idée de me l’avoir offerte pour Noël … Car cette partie de l’œuvre de Georges Remi – alias Hergé – est bien moins connue que les insurpassables héros des aventures de Tintin et ses acolytes.
Cette série familiale (on ne cesse de voir l’angoisse du couple Legrand devant les périls surmontés par leur progéniture) a été publiée entre 1936 et 1957 dans « Cœurs Vaillants »). La lecture en continu des cinq aventures proposées ici permet de retrouver les grands thèmes de la saga hergéenne, avec parfois de très grandes similitudes dans les gags ou les décors.
Comme pour les aventures de Tintin, Hergé utilise la technique de la "ligne claire" dans Jo, Zette et Jocko. Cependant, les lignes sont ici très épurées, et les détails superflus sont évités, les décors souvent lisses – on voit que E. P. Jacobs n’y a pas encore prêté la main. Mais on peut aussi se référer à ce qu’en a fait récemment Floch dans le dernier hors-série des aventures de Blake et Mortimer.
Hergé était connu pour sa quête de réalisme. Il faisait des recherches approfondies sur les sujets abordés – en particulier les nouveautés technologiques - pour garantir une précision visuelle et narrative.
Les planches sont organisées de manière logique, avec une disposition claire des cases. Cela facilite la compréhension de l'histoire et le suivi de l'action. Les personnages des méchants sont très typés. On retrouvera ces modèles dans Allan, ou Rastapopoulos.
Les aventures de Jo, Zette et Jocko suivent naturellement les thèmes d'aventure et de mystère chers à Hergé. On ne peut s’empêcher de penser aux épisodes récurrents : fascination de la mer, la base sous-marine secrète, le concept de savant fou – chers plus tard aux films tirés des personnages de James Bond –le gag des patins à roulette est repris avec le professeur Tournesol.
Avec ce point original d’une intelligence supérieure confiée à un couple de très jeunes ados, plus l’intelligence animale de leur singe. Ils sont capables de tout, parfaitement complémentaires dans l’art de faire des bêtises et de s’en tirer avec brio, ces enfants : piloter un avion, un tank amphibie, un avion … il est vrai que leur père est ingénieur ! Autre détail : ces jeunes héros sont français à la différence de Quick et Flupke, qui datent de 1930.
On n’échappera pas cependant au reproche très daté fait à Hergé quant à la représentation caricaturale des peuples primitifs ou de la civilisation indienne … C’est le fruit d’une époque insupportable de nos jours.
Cinq épisodes originaux, qui recèlent tous les thèmes de leur auteur, sans filtre. A lire en conservant à l’esprit l’outillage mental de leur époque.
Jo, Zette et Jocko, cinq épisodes par Hergé (Le Manitoba ne répond plus, L’Éruption du Karamako, Le Testament de M. Pump, Destination New York et La Vallée des Cobras), édité en grand format chez Casterman, 272 p., 30€