Slavik, les années Drugstore, ouvrage collectif
Pour Noël, j’ai reçu de nombreux livres et rien ne pouvait me faire plus plaisir. Merci à tous les donateurs et donatrices.
En particulier, pour le premier dans lequel je me suis plongée avec gourmandise : à la fois livre d’art, chronique de notre jeunesse, ouvrage d’histoire des Trente Glorieuses, de sociologie … et de gastronomie.
Slavik incarne pour moi le décor de mes années de sortie d’adolescence : un décor flamboyant, très bling-bling et pas toujours du meilleur goût, l’explosion de la société de consommation avec l’arrivée à l’âge adulte des babyboomers. En particulier, l’ouverture du Drugstore Publicis Saint-Germain en 1965, l’année de ma première année d’études rue Saint-Guillaume.
Nous connaissions déjà le concept de drugstore à la française depuis 1958 aux Champs-Elysées, puis avec le Pub Renault … et puis une multitude de décors de brasseries, bistrots et pubs à la mode.
Partout, on s’arrachait ce décorateur efficace au style toujours aussi reconnaissable.
Cet ouvrage nous en dit bien davantage sur un artiste, pas seulement actif dans la bistronomie …
Wiatscheslav Nicolaïevitch Vassiliev, né en 1920 à Tallin, est le fils d’un officier de l’armée du Tsar réfugié en Estonie où sa famille réside entre 1920 et 1927. Ses parents divorcent en 1922 et il finit par arriver à Paris avec sa mère et sa grand-mère en 1927.
Formé à l’Ecole nationale supérieure des Arts décoratifs et à l’Idhec, Slavik se destine à la peinture : ses œuvres de jeunesse s’inspirent des surréalistes, de Dali, Cocteau ou Georgio de Chirico. Il travaille avec Cassandre, Jacques Adnet et Serge Lifar.
Il sera créateur de cartons pour la manufacture des Gobelins, metteur en scène pour les vitrines des Galeries Lafayette, dirige le département d’esthétique industrielle créé par Marcel Bleustein-Blanchet, travaille pour de grands groupes industriels comme Shell et Renault, réinvente les bistrots qui deviennent des "pubs" à Paris et dans toute la France (200 restaurants, bistrots et brasseries à Paris), des lieux où se pressent les peoples qui comptent, des espaces contraints d’exception comme le Jules Verne au deuxième étage de la Tour Eiffel.
Pour ma part, je me souviens surtout du choc des médaillons de bronze représentant des bouches et des yeux de célébrités, ainsi que les mains à 6 doigts en guise de chapiteaux sculptés par Marie-Pierre Thiébaut dite Oonga pour l'établissement de Saint-Germain des prés. Plus tard, avec nos filles petites, nous avons sauvent hanté le drugstore Publicis des Champs-Elysées pour y déguster des glaces fantastiques … et y acheter des livres que nous ramenions aux enfants pour nous pardonner notre escapade au cinéma.
Slavik, un immigré à la créativité insatiable, un travailleur de force doté d’un style atypique et flamboyant, celui de toute une époque. Que serait la culture française sans ces créateurs venus d’ailleurs ?
Slavik, les années drugstore, grand album par Pascal Bonafoux, Peter Knapp, Margo Rouard Snowman et Géraldine Cerf de Dudzeele, avec la participation de Cyril vassiliev, Barbara Vassiliev-Maynial, Philippe Maynial et Nicolas Vassiliev, publié par Norma éditions, 368p., 55€