Ceux de 14, de Maurice Genevoix, relié par Henri Mercher
On a déjà tout dit de Maurice Genevoix, l’année où cet auteur prolifique et déjà Immortel depuis son élection à l’Académie française le 24 octobre 1946 - moins d’un mois après ma naissance – entre au Panthéon. Pour ma part, je n’ai lu de lui, et il y a très longtemps, que Raboliot, qui lui valut le prix Goncourt en 1925. Mais cependant, je possède moi aussi ce livre majeur, un legs de mon vénéré père : Ceux de 14.
Et pas sous n’importe quelle forme. Un livre-bijou, habillé d’une stricte simplicité. C’est l’ultime édition (1955) des quatre parties de ce récit des horreurs de la Grande guerre. Et en le sortant de sa boîte, je comprends pourquoi, depuis ma plus tendre enfance, je me passionne pour l’histoire en général et les guerres mondiales en particulier. Ce double héritage, je le dois à mon père.
Il ne racontait pas ses exploits – jusqu’à plus de 80 ans où sur notre demande expresse, il les a retranscrits – mais il voulait comprendre. Il avait 4 ans en 1914 et 30 en 1940. Tous les livres qui paraîssaient sur cette période, il les achetait, les emmenait dans ses voyages, les lisait avidement. Pour ma part, la même quête m’a saisie dès l’âge de 10 ans. Je me souviens avoir préparé, alors en CM2, un exposé sur la guerre de quatorze, avec les cartes des offensives à l’appui. Depuis lors, je ne cesse moi aussi d’apprendre. Et la recherche historique ne cesse pas de nous donner de nouveaux éclairages sur ces conflits majeurs.
Ce livre-là revêt pour moi une valeur particulière. Mon père avait noué au ministère des Affaires étrangères une solide amitié avec un homme de bien, chargé au sein de l'institution, de restaurer les traités signés par la France. Bernard Clavreuil, un artisan d’art du livre, donna à mon père les premiers rudiments de la technique de la reliure. Et lui permit de faire la connaissance d’un des plus grands relieurs de son temps : Henri Mercher (1912 – 1976), dont l’atelier était situé rue Visconti. De cela aussi, je me souviens, car je l’y ai accompagné quelques fois.
De là aussi provient sans doute ma passion jamais totalement assouvie des livres. C’est Henri Mercher qui a relié cette édition du livre de Genevoix. Un livre relié en 1962, parfait dans sa sobriété même, avec des gardes peintes à l’aquarelle évoquant les éclatements d’obus …
Il est sans doute temps, aujourd’hui, que je me plonge dans cette lecture et cesse de ne considérer que l’objet d’art.
Définitivement en effet, je considère le livre comme un bien essentiel, moi aussi … Et la prochaine fois que je serai dans ma campagne, je m’attaquerai aux deux séries de reliures réalisées par mon père : les mémoires du général de Gaulle - trois tomes reliés en cuir bleu, blanc et rouge, et celles de Winston Churchill. Elles sont toujours d’actualité et il y aura de quoi lire.