Tuer est un art, polar historique de Philippe Grandcoing
On commence vraiment à s’attacher au personnage créé par Philippe Grandcoing dans ce troisième épisode mettant en scène Hippolyte Salvignac et son ami l’inspecteur Jules Lerouet.
La petite quarantaine, mais vite essoufflé, séducteur et élégant, toujours célibataire mais cependant un peu complexé par son origine de fils de notaire quercynois, pas très à l’aise dans la société intellectuelle parisienne. Passionné d’art ancien et d'architecture, amateur d'arts premiers, il fréquente les artistes les plus iconoclastes de l'époque, Hippolyte vit de ses rentes mais commence à se poser des questions existentielles.
Pour le lecteur qui aime se replonger dans l’atmosphère des tableaux de Jean Béraud, c’est un plaisir …
L’intrigue ne sert ici, finalement, que de prétexte à partir sur les routes de Normandie en compagnie de Maurice Leblanc et de sa sœur Georgette, actrice célèbre et compagne de l’écrivain belge Maurice Maeterlinck, et tout semble tourner autour du vieux maître bardé de doutes Claude Monet et de sa sublime propriété de Giverny.
Même si Clémenceau lui fait l’honneur de sa confiance en raison de ses deux précédentes interventions, Salvignac joue un peu les utilités sans vraiment comprendre pourquoi une série de cadavres de vagabonds parsème les rives de la Seine : des hommes de rien, chétifs ou malades … mais qui semblent avoir pour seul point commun une proximité pouvant perturber Claude Monet, le très bon ami du ministre de l’Intérieur.
L’enquête doit donc rester discrète mais elle va recevoir l’appui d’un homme aussi sagace que célèbre : le « père » d’Arsène Lupin. L’auteur rend ici un hommage appuyé à Maurice Leblanc, tout comme, voici quelques années le fit Michel Bussi dans ses romans « Nymphéas noirs » et « Code Lupin ».
Encore un prétexte pour visiter les grand sites comme le falaises d’Etretat, la cathédrale de Rouen, les ruines de Jumièges et l’abbaye de Saint Wandrille, le pont de Vernon, le château de Tancarville … A plusieurs reprises, il suffit de consulter les images de ces décors pour vérifier combien la description en est fidèle.
En fait, et comme il est d’usage, la clé de l’énigme n’apparaît que dans les derniers chapitres, avec une scène de suspens et une fin tout à fait morale de cette sombre histoire, où l’auteur ne peut s’empêcher de nous enseigner le détail des grandes affaires de cette « Belle Epoque » comme les derniers ressauts de l'affaire Dreyfus et l'affaire du double meurtre de l'impasse Ronsin qu’il connaît si bien.
Tuer est un art, policier historique de Philippe Grandcoing, aux éditions De Borée dans la collection Vents d’Histoire, 285p., 19,90€