La Cathédrale Sainte Marie d'Aix La Chapelle, dernière demeure de Charlemagne
Située à l’extrémité occidentale de l’Allemagne, Aix La Chapelle est aujourd'hui une ville industrielle et universitaire d’environ 250 000 habitants, à la jonction des frontières de la Belgique et des Pays-Bas. On dit qu’elle fut fondée vers 124 par le Romain Granus Serenus, frère légendaire de Néron, autour de ses sources chaudes. Il y avait très longtemps que je souhaitais venir sur place m’imprégner de ce morceau d’histoire commune … depuis que j'avais appris, comme tout le monde, que Charlemagne avait inventé l'école !
Pépin le Bref, fils de Charles Martel et père de Charlemagne y avait fait bâtir un château. Son fils, las de faire balader sa cour entre diverses résidences royales, y fixa définitivement sa capitale, avec l’idée d’y faire renaître une brillante civilisation, à l’instar de Byzance ou de Rome, au nord des Alpes.
Charlemagne fait construire un complexe palatial constitué d’une salle de réception rectangulaire (aula regia) de grandes dimensions (sur le modèle de la basilique constantinienne de Trèves), de bâtiments d’habitation et, parallèle à la grande salle et en contrebas, une chapelle dédiée à la Vierge et destinée à abriter son tombeau. Les deux bâtiments principaux sont reliés par deux couloirs parallèles, l’un en maçonnerie, l’autre en bois. Devant la chapelle, un atrium rectangulaire dont subsiste aujourd’hui une place.
La chapelle palatiale est le premier édifice à coupole construit au nord des Alpes. Elle fait référence à la Jérusalem céleste, basée sur le nombre 8, symbole de perfection. C’est un bâtiment de plan centré, un octogone de 16 mètres de diamètre, sur une hauteur de 30 m, surmonté d’un déambulatoire à 16 pans. Elle s’inspire de l’église San Vitale de Ravenne et en comporte d’ailleurs nombre d’éléments de remploi (colonnes, chapiteaux).
J’ai été un peu déçue d’apprendre que les mosaïques qui recouvrent les voûtes sont en réalité de facture récente. Au XVIIIème siècle en effet, on les a retirées pour les remplacer par des stucs à la mode du temps C’est à partir de gravures que le décor de la coupole a pu être reconstitué à partir de 1878 – il représente le Christ entouré des 24 vieillards de l’Apocalypse. Les travaux de reconstitution des mosaïques et du pavement de marbre ont été terminés en 1913, les décors des voûtes du déambulatoire sont des créations néo-byzantines du début du XXème siècle.
De 1355 à 1414 fut adjoint un vaste chœur gothique, sur le modèle de la Sainte Chapelle, avec un étonnant polygone à 9 côtés en abside et des fenêtres d’une très grande élégance (plus de 25 m de haut. C’est dans cet espace que sont exposées les deux châsses contenant l’une les restes de Charlemagne, l’autre, les Grandes reliques dont Charlemagne a doté la chapelle afin d’en faire un lieu majeur de pèlerinage : les langes de Jésus, la robe de la Vierge, le tissu qui enveloppait la tête tranchée de Jean-Baptiste et le pagne du Christ lors de sa crucifixion. Depuis 1239, ces reliques sont montrées aux pèlerins tous les 7 ans … et le prochain pèlerinage se tiendra en 2021.
Au premier étage de l’hexagone se trouve le trône de Charlemagne : il regarde vers l’ouest, face à la figure du Christ en majesté, en marbre nu, sans aucune décoration, juché sur quelques marches. Là, entre 936 (Othon 1er) et 1531 (Ferdinand 1er), furent intronisés 30 rois et 12 reines,après avoir été oints et couronnés à l’autel principal.
Cette cathédrale est donc une œuvre successive, riche de plus de 1200 ans, chaque époque y apportant sa marque, pas toujours heureuse. Par exemple, le toit de la coupole, qui date du XVIIème siècle et que les Aixois surnomment « le presse-citron », la chapelle hongroise et le portail datent du XVIIIème ou le pont qui relie la coupole à la tour achevés en 1884.
Mais la découverte de l’édifice demande au moins deux visites … (à suivre).
Ici, à gauche, le plan de la chapelle d'origine.