Avis de gros temps pour Mary Lester, polar de Jean Failler
Aujourd’hui, je prends le mors aux dents … Pour me changer de mes dernières lectures un peu anxiogènes, j’ai acheté le dernier livre de Jean Failler, qui livre la 44ème enquête de Mary Lester. J’apprécie les personnages récurrents, leurs aventures, le cadre – ici, autant Paris que la Bretagne – dans lequel ils évoluent, leur psychologie, leurs âmes damnées …
Mais il y a des limites !
Dans cette affaire ténébreuse de corruption policière qui fait référence hélas à plusieurs scandales ayant récemment secoué la police criminelle – un vol important de drogue à la brigade des stup’s du 36 Quai des Orfèvres, les violences sexuelles à l’encontre d’une touriste par des flics, l’arrestation d’un haut gradé de la police lyonnaise – le Commandant Mary Lester, toujours sous les ordres de son bien-aimé patron le Commissaire divisionnaire Fabien et protégée par son équipier-colosse Jipi, est sollicitée par une « huile » pour démêler une sombre machination. Ce sera par collègue interposé car elle ne veut pas venir à Paris.
Ce personnage haut placé – Ludovic Mervent - est campé de façon totalement caricaturale : imbu de sa personne, machiavélique mais surtout incompétent en matière de police – il a été jadis envoyé en remplacement temporaire du commissaire de Quimper – arriviste, pétochard … Tout pour plaire. Et, en plus, c’est un énarque ! Alors là, je dis stop ! Jean Failler devrait tout de même, depuis le temps qu’il écrit ses polars, se doter d’un conseiller au fait des arcanes de l’Administration. A-t-on jamais vu un truc pareil ? Les membres du cabinet du ministre de l’Intérieur chargés de suivre les affaires de sécurité sont des policiers particulièrement chevronnés devenus Contrôleurs généraux (de 1ère classe) et le conseiller du Président de la République en ces affaires est généralement un Préfet. Enarque à la base le plus souvent, certes, mais que l’on n’imagine pas dîner en tête à tête avec un officier de police de province, fut-elle une femme aussi intelligente que jolie comme Mary Lester.
Bref, ce n’est pas la première fois que je discerne, dans certains polars à la française ou des séries télévisées, des incongruités de procédure. C’est ce qui fait la différence avec les polars américains ou britanniques : les auteurs anglo-saxons travaillent et se documentent. Ici, on a essentiellement des dialogues mis bout-à-bout, des expressions toutes faites éculées (« coup d’épée dans l’eau » est une formule qui revient 3 fois !), des situations irréalistes, une critique systématique et ennuyeuse du genre « tous pourris » sans grand intérêt.
« Les jeunes générations ne savent plus jouer à la belote ! » déplore un des flics … Les anciennes générations devraient, elles aussi, se mettre au parfum des vrais rouages de la société actuelle.
Avis de gros temps pour Mary Lester, polar de Jean Failler aux éditions du Palémon, 320 p., 10€.