Le bourreau de Gaudi, polar de Aro Sainz de La Maza
Un roman flamboyant(!), une intrigue construite minutieusement, qui souligne l’extraordinaire travail de recherches d’indices par les forces de police, montre les faiblesses des acteurs mais aussi leur extraordinaire implication pour faire face à une menace folle : celle d’un tueur en série qui brûle ses victimes vivantes, accrochées aux œuvres emblématiques du génial architecte de Barcelone : Antoni Gaudi.
C’est peu dire que j’ai une passion pour cet architecte aussi mystérieux que complexe, passion que j'ai transmise à ma plus jeune fille - c'est elle qui m'a passé ce livre - et pour la ville qu’il a façonnée : Barcelone, vibrante, écrasée de chaleur en cet été meurtrier, pleine de lumière et de corruptions en tous genres. L’inspecteur Malart est en pleine crise caractérielle, se croit devenir fou, culpabilise pour le suicide de son neveu qu’il n’a pas anticipé, flanqué d’une équipe de policiers dont certains ne sont pas très clairs, mais soutenu par une magistrate dynamique, et la piste de notables pédophiles … On nage en pleine actualité, hélas.
Bien que nombre d’éléments de ce polar hyper-noir soient classiques : un héros atypique plein de contradictions – il ne dort jamais, il mange n’importe quoi, est violent, ne respecte pas la hiérarchie, mais ne boit jamais d’alcool, a le « don » de s’immiscer dans la peau du criminel – la corruption des gouvernants et des médias, on s’attache à cette histoire de meurtres spectaculaires implacablement planifiés.
C’est un véritable jeu de piste à travers la ville qui fait appel à la connaissance des édifices les plus célèbres de la capitale de la Catalogne. En particulier les grilles dessinées par l’artiste aux lignes ondoyantes. On y décrypte aussi les multiples symboles maçonniques jalonnant l'oeuvre de larchitecte pourtant devenu mystique, on admire le perspectives fantastiques de la cité qui organisa les Jeux Olympiques de 1992 au prix d’intenses investissements pour la réalisation d’autoroutes et d’infrastructures dévoreuses d’espace et productrices de hauts revenus …
C’est aussi une course contre la montre. On commence par l’enlèvement, la séquestration puis le meurtre spectaculaire d’un financier, ensuite du patron prévaricateur de la fondation Cercle Gaudi, puis d’un journaliste qui fait dans le sensationnel et enfin le rapt de la juge qui instruit la première affaire. Quel rapport relie ces victimes ? L’inspecteur Milo Malart a beau remuer ciel et terre, on ne peut pas dire que ses supérieurs lui facilitent la tâche. On l’accuse d’avoir été à l’origine de fuites, on l’astreint à une psychothérapie, on le met à pied, puis on lui adjoint une collaboratrice pour lui servir de chaperon. La jeune Rebeca Mercader tombera vite sous le charme … évidemment !
Bref, c’est un polar haletant, d’un bout à l’autre. J’attends avec impatience les prochains épisodes, puisque je sais déjà qu’après ce premier succès éditorial, un deuxième roman a été écrit et qu’un troisième est en cours d’écriture. J’adore les personnages récurrents, l’inspecteur Camilo Malart va donc désormais faire partie – comme Jean-Baptiste Adamsberg, Guido Brunetti, Pepe Carvalho et Thomas Linley – de l’équipe de mes policiers préférés.
Le bourreau de Gaudi (El asesino de La Pedrera), polar de Aro Sainz de la Maza, publié chez Actes Sud, traduit de l’espagnol par Serge Mestre, 664 p., 23,80€