Introduction à l'histoire de la langue française, par Michèle Perret
Loin de moi la prétention d'écrire la critique d'un ouvrage universitaire portant sur une matière que je ne maîtrise absolument pas. Simplement, j'ai eu envie de lire ce manuel parce que l'évolution raisonnée de ma langue maternelle m'intéresse passionnément. Le français recèle tant de curiosités dans la manière de prononcer ou d'écrire qu'un tel livre vous ouvre des portes isoupçonnées.
"Le français est une langue issue du latin adoptée par des colonisés d'origine celtique. Cette population gallo-romaine a ensuite subi des invasions germaniques, qui ont aussi influencé la langue française."
Tout le monde sait ça peu ou prou.
Mais avec Michèle Perret, les mutations lexicales et phonétiques deviennent compréhensibles. On y apprend une foule de choses et on profite de son humour : surtout ne pas rater les encadrés !
Dans l'histoire de notre langue, quelques jalons : Ou premier texte écrit en langue "vulgaire" date de 842, "Les serments de Strasbourg" constituent un pacte de non-agression entre les trois frères qui se partagent le territoire, en 1539 l'ordonnance de Villers-Cotterêts qui prescrit que les actes de procédures soient rédigés en français, Colbert qui crée une chaire de droit français dispensé .... en français, l'institution Saint-Cyr pour jeunes filles qui donne l'enseignement en français ...
L'histoire est donc faite d'ajustements successifs, avec une recherche de simplification, de chasse aux homonymes prêtant à confusion, de trucs de transcription par les scribes, avec, à partir du XVIIIème siècle, un long combat contre le latin et les dialectes.
Cependant aujourd'hui, la langue française est devenue la plus normative du monde. Il semble qu'aucune simplification ne soit de nouveau admise. Depuis qu'existe l'enseignement primaire obligatoire, que la guerre de Quatorze a imposé le seul français pour la transmission des ordres, et l'omniprésence de la télévision, les dialectes ont disparu, l'orthographe ne s'améliore plus ... J'ajouterais que sa maîtrise est devenue un fort marquage social.
Dommage, car les facteurs de créativité de la langue, ainsi décrits par H. Frey (La grammaire des fautes), demeurent : ils sont destinés à satisfaire cinq besoins souvent contradictoires : assimilation, invariabilité, clarté, briéveté et expressivité. Un seul petit exemple qui m'a bien fait sourire : le mot "choucroute" ... à l'origine, le terme germanique de "sauerkraut" où "sauer" signifie acide et "kraut" chou. Par glissement et assimilation, on en est venu à substituer chou en tête de mot, quant à croute ????
Un manuel destiné aux cycles L et M de sciences du langage et de lettres, pourtant relativement accessible au néophyte, surtout s'il a étudié le latin et le grec ... une pont entre tradition et modernité. Une façon, en s'accrochant, d'accroître sa culture générale !
N.B : j'espère que l'auteure (est-ce bien comme ça qu'on doit écrire ?) ne m'en voudra pas d'avoir commenté son travail ....et, pour les si plus jeunes (d'esprit, en tous cas), ne manquez pas La véridique histoire de Mélusine ....
Introduction à l'histoire de la langue française, 3ème édition, par Michèle Perret, chez Armand Colin, 204 p. 19€