Musée Toulouse-Lautrec d'Albi
Henri de Toulouse-Lautrec (1864-1901) mérite bien une journée de voyage. Albi, c’est à peu prés 200 kilomètres aller et autant retour depuis chez nous, mais nous en sommes revenus pleins de si belles images !
La collection – la plus importante du monde – est logée au Palais de la Berbie. Plus de mille œuvres : dessins, lithographies, affiches, illustrations de revues, pastels, huiles sur bois, sur toile, sur carton … Elle a été léguée par la mère de l’artiste, Adèle Tapié de Celeyran, après la mort de son fils à l’âge de 37 ans, rongé par l’alcoolisme et la syphilis.
Car Henri de Toulouse-Lautrec fut un enfant à la santé précaire, que son mode de vie dissolu ne fit rien pour améliorer. Il souffrait d’une fragilité congénitale des os et se brisa successivement les deux fémurs à l’adolescence. Sa taille ne dépassait pas 1, 52 m. Mais son génie n’est pas à mesurer à cette aulne …
La présentation du musée est chronologique. On regrette toutefois que si peu d’explications biographiques y figurent. Ah … si seulement Marc Restellini* était passé par là ….
On voit ses premiers dessins d’enfant, et on suit la progression depuis la première toile – l’artilleur sellant son cheval – à sa dernière œuvre.
On admire la maîtrise du trait, les portraits tellement expressifs, les compositions originales, parfois totalement asymétriques comme le célèbre «Salon de la rue des Moulins », l’extraordinaire rendu des lumières des cafés-concerts, les affiches des vedettes de cette fin de siècle : Jane Avril, Louise Weber dite la Goulue – la troupe de french-cancan de Mademoiselle Eglantine, Yvette Guilbert aux longs gants noirs et à la voix rauque que l'on entend encore chanter "Madame Arthur, est une femme .....", les prostituées au regard las, l’œil vague de Suzanne Valadon, qui fut sa maîtresse et qu’il représente en Buveuse –ou la gueule de bois –
Il représente aussi de beaux messieurs en frac comme Louis Pascal, ou son cousin médecin Gabriel Tapié de Celeyran. Ou encore Maurice Joyant, son ami et marchand de tableaux, en ciré jaune et fusil en main. Et sa mère, si triste, si digne, si désolée de ce fils qui lui reste et qui souffre tant …
C’est Adèle de Céleyran qui fait don des œuvres de son fils à la ville d’Albi, en 1909, pour en doter un musée qui sera logé dans l’ancien palais épiscopal. La Grande guerre retardera l’éclosion du projet et le musée ne sera inauguré qu’en 1922. Maurice Joyant se sera démené de toutes ses forces, proposant la collection au musée du Luxembourg, sans succès.
Car les tenants de l’Académie n’aiment pas Toulouse-Lautrec. Son professeur Léon Bonnat, de disait-il pas « votre dessin est tout bonnement atroce » ?
Inclassable, donc, indépendant, transcourants, tout ce qu’on veut. La variété des techniques et des supports, la façon de brosser à grandes hachures, le velouté ou la vivacité d’un regard, la courbe d’un menton, la lassitude d’une attitude ou simplement toute la tendresse qui émane du tableau « Les deux amies ».
Je vous préviens, la visite du musée d’Albi est un incontournable, qui vous laissera un sentiment violent et doux.
Musée Toulouse Lautrec, place Sainte Cécile, 81003 Albi, 05 63 49 48 70, fermé le mardi
* Marc Restellini est le directeur de la Pinacothèque de Paris, je suis fan de ses expositions à la fois originales et didactiques.