Artemisia, première femme peintre baroque, au musée Maillol
Les femmes peintres sont à la mode. Après Berthe Morisot, Artemisia Gentileschi (1593 – 1652).
Un méritoire effort pour mettre en lumière non seulement une femme, mais, fait plus rare, un peintre du XVIIème siècle. mais pas tout à fait réussi, et c'est dommage.
Elle commence à signer sa première œuvre à 17 ans, dans l’atelier de son père Orazio, un maître reconnu. C’est sans doute d’elle qu’il fait le portrait en Sibylle (ici à gauche), et elle est très belle, bien plus douée que ses frères, eux aussi apprentis dans l’atelier paternel.
Cependant, elle va vivre un drame deux années plus tard : un viol par un des amis et familiers de l’atelier de son père, qui lui a promis de l’épouser, avant de se dédire. Orazio intente un procès au violeur de sa fille, Agostino Tassi, qui sera une pénible épreuve pour celle-ci, dont on ne reconnaît la bonne foi qu’après d’intenses est humiliants débats. La victime est soumise à la torture, mais elle tient bon. Son agresseur sera condamné à une peine peu sévère, mais elle y perdra sa réputation et devra se marier à un peintre médiocre, qui aura tout de même l’élégance de lui laisser continuer son art.
De cette ténébreuse affaire, les romanciers, les adeptes de la cause féministe, les cinéastes et les psychanalystes s’empareront. En tous cas, le contexte est à connaitre pour mieux apprécier cette première femme peintre, que les cours d’Europe s’arrachent, et qui vit une existence de femme libre en élevant seule ses enfants, les légitimes et les autres, avec un mari et un amant.
L’exposition est intéressante, mais elle est accrochée selon une logique qui nous a échappé. On commence par les œuvres de la fin, on a du mal à attribuer ce qui est de la main de l’artiste ou de son atelier, car Artemisia produit beaucoup, a beaucoup de succès. Elle voyage en Europe, à Florence, Rome, Londres, Naples.
Ses portraits et ses nus féminins sont célèbres (à l'époque on les accroche dans la chambre, avec une draperie pour les masquer), comme le motif maintes fois répété de Judith et Holopherne, où parfois, elle donne ses propres traits à Judith et ceux de Tassi à la tête coupée avec une incroyable violence.
On note une prédilection particulière pour les héroïnes hors du commun : Cléopâtre, Danaé, Suzanne, Bethsabée.
Ses représentations religieuses sont moins convaincantes. Je préfère ses œuvres de jeunesse à celles de la fin, qui sentent la commande.
Une exposition un peu fourre-tout, mal expliquée, chère, mais néanmoins rare puisque ces peintres – à part Rubens, Le Caravage (dont l’influence est partout présente chez Artemisia et son père), Georges de La Tour, Vermeer (ma sélection personnelle)– ne sont redevenus à la mode que très récemment.
Et surtout, un destin de femme exceptionnel, à la fois pour son époque et pour le temps présent.
Artémisia, Pouvoir, gloire et passions d’une femme peintre, exposition au musée Maillol jusqu’au 15 juillet, 59-61 Rue de Grenelle – Paris 7ème, tous les jours, 11€.