Les illusions orientales, polar historique de Philippe Grandcoing

Juin 1913, deux semaines après la signature à Londres d’un traité mettant fin (!) à la Première Guerre balkanique … nous retrouvons accoudés au bastingage d’un paquebot Hippolyte Salvignac et son alter ego, l’ex-inspecteur Jules Lerouet, qui a quitté la Sureté après le drame qui a coûté la vie à sa compagne, accompagnés par Anatole Savignac, le cousin du père d’Hippolyte, un retraité qui, après des années passées en Egypte, s’est retiré à Albas.

Le trio s’est lancé à la recherche des traces laissées par le père que Jules n’a jamais connu. Ce Pierre, qui s’est embarqué vers les Indes pour faire fortune et revenir épouser Marthe, la mère de Jules, a fait naufrage en mer rouge et se serait fixé à Obock, minuscule territoire dépendant de Djibouti où il a fait souche en tant que commerçant (et sans nul doute trafiquant), s’est converti à l’Islam. 

On apprend qu’il vient d’y décéder. C’est Anatole, riche célibataire, sans doute nostalgique de l’Egypte, qui finance l’expédition.

Leur périple va les conduire à Alexandrie, au Caire, à Obock, Beyrouth, Istamboul, Andrinople, au cœur du Proche-Orient en une période où les bruits de bottes se font de plus en plus clairs.

Le père de Jules, Pierre devenu Botros, a laissé un testament en faveur de Jules et une fortune investie auprès d’un banquier stambouliote que le trio va s’efforcer de retrouver. Mais ils ne sont pas les seuls sur le coup.

Au-delà des péripéties de cette quête en pays quasiment inconnu, des difficultés rencontrées lorsqu’on ne parle pas la langue, les lenteurs des traversées, l’aventure nous permet de saisir, quelques mois seulement avant le déchaînement de la Grande guerre, les enjeux géopolitiques de la région et plus particulièrement la situation de l’Empire ottoman.

Coups d’Etat au sommet du pouvoir, antagonismes des grandes puissances face aux poussées nationalistes des différentes communautés balkaniques, ingérences étrangères, expansionnisme de la Serbie et de la Bulgarie, souci des puissances de maintenir en survie l’empire ottoman pour ne pas déstabiliser l’équilibre européen en faveur de la Russie : l’Europe est une poudrière …

J’ai beaucoup apprécié les déambulations du trio d’enquêteurs dans les différents quartiers d’Istamboul, de l’hôtel Péra Palace au pont de Galata, des rives du Bosphore au Phanar, cette fascinante mégalopole cosmopolite où se mêlent tant de vestiges de mondes disparus.

Une fois tournée la dernière page de cette huitième aventure d’Hippolyte Salvignac, j’ai un peu mieux compris le parallélisme entre l’ambiance de cet été 1913 et celle que nous éprouvons aujourd’hui dans la perspective d’un conflit majeur …

Les illusions orientales, polar historique de Philippe Grancoing, collection « Vents d’histoire » De Borée éditeur, 298 p., 20,90€

Comments

[Jauneyris]

Merci pour cette référence bibliographique. Agréable journée

[Catherine Jouanneau]

Les polars historiques sont une façon ludique de parfaire ses connaissances d'une époque. Je prends note de tous ceux que vous lisez pour compléter ma liste de livres à lire (il me faudra plusieurs vies !!!)
Bonne journée