Christofle, une brillante histoire au musée des arts décoratifs
La maison d’orfèvrerie Christofle, de sa fondation dans les années 1830 à nos jours, demeure une marque d’excellence créée par une lignée d’orfèvres et d’entrepreneurs de génie, initiée par Charles Christofle (1805-1863), son fils Paul puis son neveu Henri Bouilhet (1830-1910). Elle a toujours évoqué pour moi comme pour ma génération, la quintessence de l’art de vivre à la française.
Des tables dressées, intimes ou majestueuses, à travers cette exposition effectivement brillante, font revivre le faste des grands restaurants et palaces comme le Ritz, des trains, paquebots et avions de légende comme l’Orient-Express, le Normandie et le Concorde, et aussi des lieux du pouvoir politique, tous équipés par Christofle et le plus souvent associés à la porcelaine de Sèvres et au cristal de Baccarat, ambassadeurs en France comme à l’étranger.
Car de mon temps, l’objectif de toute jeune bourgeoise en âge de se marier était de pouvoir se faire offrir, sur sa liste de mariage, une « ménagère » en métal argenté Christofle …
La Rolls des couverts pour recevoir à dîner, moment essentiel de la sociabilité et de la représentation …
Je suppose que de nos jours, tous ces rituels ont largement disparu … Cependant, la marque demeure, gage de bon goût … mais le besoin d’éblouir les amis s’est déplacé ailleurs.
C’était un puissant moteur de consommation à la folle époque du Second Empire et de la Révolution industrielle : grâce au procédé inventé par Henri de Ruoltz et son brevet sur l’argenture et la dorure par électrolyse, tout métal non précieux pouvait désormais être recouvert d’une couche d’argent ou d’or.
Le brevet acheté, Christofle produit ses premières pièces d’orfèvrerie dès 1845 sur ses propres modèles. A l’exposition universelle de 1849, il reçoit la médaille d’or et les commandes les plus prestigieuses affluent, en particulier celle de la Cour impériale.
Une innovation technologique, une application artistique, un terreau économique en pleine croissance où les fêtes font partie de la communication envers les clients et qui séduit les acheteurs étrangers … la recette d’un succès qui traverse les régimes politiques, les modes et les styles.
Style rococo (historicisme) et surchargé sous Napoléon III, art nouveau, japonaiseries, art déco, pop’art des années 70, les pièces les plus folles sont présentées à cette exposition dans un décor de plâtre brut en total contraste.
En guise d’introduction, ne pas manquer le surtout de table gigantesque récupéré après l’incendie des Tuileries durant la semaine sanglante de mai 1871 : un sommet de l’art pompier … ou un clin d’œil ? Génial !
Christofle, une brillante histoire, exposition jusqu’au 20 avril au Musée des Arts décoratifs, 107 rue de Rivoli 75001 PARIS, à partir de 11 h sauf le lundi -15 € .