Et vous, êtes-vous "woke" ?
Connaissant mon intérêt pour l’histoire des technologies, Florence m’a passé ce livre passionnant "Le magasin du monde" qui retrace les origines de 95 objets du quotidien et leur parcours autour de monde. Elle m’a néanmoins indiqué : « C’est très intéressant, mais tu verras, le discours est plutôt woke » … J’ignorais ce concept. Donc, je me suis renseignée ….
Woke est un terme né sur les campus des universités américaines au début des années 2010 et plus spécifiquement à l’occasion du mouvement « Black Lives Matter ». Il signifie « être éveillé, conscient » des inégalités et de l’oppression subie par les minorités. Un esprit militant et combatif en faveur de tous les persécutés, genrés, racisés, opprimés. Un mouvement qui peut aller jusqu’au sectarisme, un certain totalitarisme de la bien-pensance (antispécisme …), une idéologie parfois agressive.
Après la disparition progressive des repères traditionnels (religions, syndicats, partis politiques, éducation, mariage …), on assiterait à la montée en puissance d’une nouvelle idéologie culturelle unique, induite par l’individualisation extrême, véhiculée par les réseaux sociaux, le numérique remplaçant désormais les canaux d’expression traditionnel de la démocratie. Pour certains, manier le discours victimaire et exploiter les théories du complot pour toucher ceux qui se sentent discriminés est une technique efficace de déstabilisation de la population.
En fait, c'est une autre forme de conformisme et désormais de « politiquement correct » qui conduit certains à déboulonner des statues, modifier le nom de romans célèbres, retirer des catalogues des films qui ont marqué l’histoire du cinéma : c’est la culture de l’annulation (cancel culture) qui juge l’histoire passée avec l’outillage intellectuel du présent.
Ce n’est pas pour autant qu’il faudrait oublier toutes les richesses que les peuples colonisés et exploités de façon si cruelle ont apporté à l’Occident.
Comprendre la trajectoire du racisme est indispensable pour le combattre efficacement, et ce, dès l’enfance. Le faisons nous ? Car il est bien d’autres moyens de provoquer la réflexion décoloniale, par l’analyse objective et l’étude des faits, la lucidité, la prise de conscience du rôle des élites politiques d’une époque, persuadée jadis - je pense à Jules Ferry - de sa supériorité sur les autres peuples de la terre. Un seul s'est élevé contre cette certitude : Georges Clemenceau ...
Barak Obama lui-même s’inquiète de cette dérive moralisatrice : « Si tout ce que vous faites, c’est juste de jeter la première pierre, alors, vous ne faites pas grand-chose. » Car, depuis son canapé et avec son smartphone, injurier Mila ou pleurer sur les animaux tués par les incendies en Australie ne change en réalité rien à la face du monde. C’est une opinion, pas une action engagée.
Bref, les Etats-Unis ne sont pas la France, mais je m’interroge sur l’efficacité de l’activisme woke dans l’indispensable lutte contre le racisme et les discriminations subies par certaines catégories de l’humanité – une en particulier dont je me sens solidaire : les femmes !
Cela n'enlève rien à l'intérêt du livre en question.
Restons donc, nous aussi "éveillés" !