Alphonse Mucha au musée du Luxembourg
J’ai une passion pour l’Art Nouveau - qui n'est pas nouvelle - et Alphonse Mucha (1860 – 1939) est l’un de ses piliers.
Cette magnifique exposition est pleine de surprises.
On peut en particulier constater à quel point le style de Mucha reste constant depuis ses années de formation à l’Académie des Beaux-Arts de Munich puis à Paris en 1887 où il arrive à l’académie Julian.
Il y rencontre Paul Gauguin avec lequel il partage son atelier de la rue de la Grande Chaumière et le dramaturge August von Strinberg.
Il est soutenu par le comte Eduard Khuen-Belasi jusqu’en 1889 puis, contraint de gagner sa vie, il livre des illustrations pour des livres, des revues, et surtout des affiches.
A cette époque de révolution industrielle et d’explosion de la consommation de masse, l’affiche tient une place centrale dans la culture visuelle grâce au perfectionnement de la lithographie et au développement de la publicité.
Mucha travaille pour l'industrie alimentaire : les maisons de champagne, les biscuits LU ... crée des séries de lithographies ... Il publiera un recueil de modèles destinés à être interprètés par les élèves artistes.
Pour Alphonse Mucha, le succès commence avec l’affiche conçue pour Sarah Bernhardt dans Gismonda : format japonisant tout en hauteur, composition hiératique, couleurs pastel … L’actrice le prend sous contrat pour six années pour ses affiches, ses décors et ses costumes.
Son univers pictural mêle les références à l'art médiéval, islamique, à l'esthétique orthodoxe, à la nature si caractéristique de ce style en vogue au début du nouveau siècle.
En 1896, Mucha signe un contrat d’exclusivité avec l’imprimeur Champenois pour lequel il produit des panneaux décoratifs. Il devient le décorateur le plus recherché et le plus copié de Paris. Mucha décore le pavillon de la Bosnie-Herzégovine pour l'Exposition Universelle de 1900, une commande qui lui donne l’idée d’une épopée sur l’unité de tous les peuples slaves. Il est décoré de la Légion d'honneur en 1901.
A partir de 1910, Mucha retrouve sa terre natale pour réaliser son grand projet historique et politique, financé grâce au mécénat du millionnaire américain Charles Richard Crane qui espère jouer un rôle en Europe centrale.
L’Epopée slave est un cycle de tableaux de très grand format destiné à inspirer tous les slaves et à guider leur avenir, à partir de scènes de l’histoire qui ont marqué ces peuples du point de vue politique, religieux, philosophique et culturel.
Ne pas manquer le diaporama des différents tableaux et de leurs détails foisonnants qui montre la maîtrise technique et l’extraordinaire talent de Mucha, à partir d’un travail préparatoire et d'une documentation colossale réunie au cours de voyages en Croatie, Serbie, Monténégro, Pologne, Russie, Grèce où l’artiste photographie les costumes et les traditions locales.
A travers ce cycle monumental, on découvre non plus un décorateur à la mode mais un peintre d’hsitoire dans la plus pure tradition de l’académisme classique, avec des références à Goya comme à William Blake … une sorte de chapelle Sixtine de l'âme slave.
Hélas, le traité de Versailles ne permet pas de rapprocher les peuples. Bientôt lâchée par les grandes puissances au profit d'une hypothétique paix, la Tchécoslovaquie est amputée de plusieurs territoires au profit de l’Allemagne conquérante et perdra son indépendance en mars 1939.
Mucha est arrêté et interrogé par la Gestapo, quelques jours plus tard, atteint d'une pneumonie, il meurt le 14 juillet, son rêve brisé.
Alphonse Mucha, au musée du Luxembourg jusqu'au 27 janvier, ouvert tous les jours à partir de 10h 30, 13€