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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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16 mai 2008

Histoire de Jacqueline et Pierre - Partie une

Tout comme j'ai relaté le récit croisé de l'histoire de mes parents, Claude a rédigé, à partir de ses souvenirs, l'histoire de ce couple auquel nous souhaitons rendre hommage. Nous, et nos trois filles, les avons aimés comme des Parents et des grands Parents, à tel point qu’un jour ils nous ont adoptés au sens de la Loi.

2008__papiers_de_famille_BriotContrairement à « Affaire terminée j’arrive », l’histoire des parents de Marie-Pierre, ce récit n’a malheureusement pas été écrit par eux : il est reconstitué, à partir de leurs souvenirs, émouvants, haletants ou cocasses, et qu’ils racontaient volontiers. Egalement d’une longue interview de Pierre Briot, donnée un après-midi de mai, sur la terrasse du Calfour, à l’ombre et dans les chants d’oiseaux, avec le bienveillant concours d’une bière fraiche. Troisième source : l’exploitation des archives familiales, dont nous sommes les gardiens.

C’est une histoire parallèle jusqu’en 1953, de deux Français nés dans des univers différents, manifestement destinés à des vies toutes simples, sinon médiocres, mais forcés par la guerre à déployer énergie et talents. Des gens qui se portent au devant du danger, décident vite, et font le choix de la difficulté.

Une enfance tranquille

Jacqueline Renaud est née le 4 octobre 1919, dans une famille de commerçants originaires du Marais vendéen, et installés à La Roche-sur-Yon.

1916_le_p_re_de_Jacqueline__en_poiluCe chef lieu, construit par ordre de l’Empereur Napoléon Ier pour gouverner la Vendée catholique et subversive, était un gros bourg sans charme, surtout peuplé, à l’époque, de fonctionnaires de Préfecture, et de commerçants qui desservaient l’économie agricole prospère du Bocage. 

Le père de Jacqueline, Alexandre Renaud, employé aux Chemins de fer de l’Etat, avait été mobilisé  pendant 4 ans en 1914-18, était rentré avec la croix de guerre, sans grave blessure, et avec la volonté de fonder au plus vite une famille pour oublier le cauchemar. La petite Jacqueline est bientôt suivie par deux beaux garçons, Guy et Yves. Tout irait bien dans ce petit monde si la maman, de santé fragile, ne donnait pas des signes d’épuisement. Une tante paternelle, Rosalie, veuve et prospère, se propose pour élever Jacqueline, déjà un peu turbulente. Jacqueline aura donc deux domiciles, celui de ses parents et celui de « Tante », tout près l’un de l’autre.1931__la_famille_Renaud

Tante Rosalie a pour meilleure amie Madeleine Joussemet, Présidente du comité vendéen de la CROIX-ROUGE, épouse de médecin ; toutes deux savent trouver une occupation utile aux jeunes gens, et c’est ainsi qu’elles mobilisent la petite Jacqueline, âgée de 8 ou 9 ans, pour les quêtes annuelles de  la CROIX-ROUGE. C’est un premier pas vers l’engagement de sa vie.

C’est à Coucy le Château dans l’Oise que naît, le 11 juin 1921, Pierre Briot ; pour cette famille-là, la vie est beaucoup plus rude : les parents sont tous deux ouvriers chez Ercuis, grande et prestigieuse fabrique d’argenterie, mais le salaire est maigre, et le petit Pierre, comme son frère, est voué à rester un ouvrier.

La guerre pour devenir adultes

Septembre 1939 : c’est la guerre. Pierre est trop jeune pour être mobilisé, mais, en Picardie, il verra les combats de près en juin 40. Jacqueline, qui a passé en 1937 son baccalauréat en mathématiques, ce qui est rare pour une jeune fille, a commencé des études de droit à Poitiers. L’armistice va y mettre fin, car Poitiers est en zone libre et La Roche-sur-Yon en zone occupée. Pas question d’ausweis pour faire des études.

Mais il y a pire : le 21 juin 1940, la Wehrmacht est entrée à La Roche-sur-Yon. La tante Rosalie, qui possède une grande maison, est requise de loger un officier allemand. Guy, le frère de Jacqueline, élève de Terminale, qui a passé 8 jours prostré de douleur, se glisse un soir chez Tante, et remet à sa sœur un pistolet allemand : « cache moi ça ». Il l’a volé dans la journée à un occupant – crime puni de mort par le code militaire. Il commence ainsi une carrière de résistant et d’officier qui le conduira aux grades de Colonel de parachutiste et de Commandeur de  la Légion d'Honneur.

Soulager les souffrances

Pour faire quelque chose, Jacqueline travaille bénévolement à la Croix-Rouge : et il y a de quoi faire pour accueillir les réfugiés de Belgique, du Nord et des Ardennes: soins, logement, nourriture, tout manque.

bombardementNantesLà aussi, il y aura pire, et même pire que tout : le soir du 16 septembre 1943, Madame Joussemet appelle Jacqueline : « NANTES a été bombardée, il faut du monde, tu pars avec une équipe». Sur les lieux, au Port, au centre ville, il y a 1500 morts et 2500 blessés ; des lambeaux de chair pendent aux arbres ; les jeunes Vendéens, qui étaient encore relativement protégés malgré la guerre, connaissent alors, et avec quelle dureté, leur baptême du feu.

Rejoindre de Gaulle par les montagnes

Pierre, lui, s’en approche. Dès 1940, il s’est mis en tête de s’engager – dans « l’Armée de l’armistice » réduite à 100 000 soldats en zone dite libre - et il veut servir dans les chasseurs alpins. Il faut rejoindre Chambery, mais il ne comprend pas bien qu’entre les Alpes et lui, il y a la redoutable ligne de démarcation, qui coupe  la France en deux, de la frontière suisse aux Pyrénées.

Il n’a, bien entendu, aucun papier ; il arrive à Chalons-sur-Saone, un matin de 1941 ; très simplement, il va dans un bistrot, et fait part de son intention de passer en zone libre. On lui dit qu’il a une chance s’il se glisse dans la masse des ouvriers d’une grande usine, tous titulaires d’ausweis, qui franchissent le pont-frontière tous les matins, à l’heure de l’embauche. Ce qu’il fait, et ça passe. Pierre inaugure ainsi une incroyable série de coups heureux, qui sont sa « marque de fabrique ».

Le voilà de l’autre coté, qui reprend le train pour Chambery. Il y arrive, court au Quartier. Il est en pleine forme, plein de fougue et de volonté de servir ; il est engagé. Il ne sera pas déçu par les Alpins : d’abord, le petit apprenti picard découvre les joies de la marche, du sport, du ski, de la montagne. C’est dur, mais ça ne lui fait pas peur. Et, pour la première fois depuis longtemps, il mange bien. De plus, les officiers ne sont pas écrasés par la défaite de 1940. Ils disent : « un jour prochain, le combat reprendra, il faut être prêts ; ici, on vous prépare à servir votre Patrie ».arm_e_armistice

Le 11 novembre 1942, ce discours devient réalité : pour répondre au débarquement américain en Afrique du Nord, les Allemands envahissent la zone libre. Les départements alpins sont occupés par les Italiens de Mussolini ; les bataillons de chasseurs alpins sont désarmés et dissous – d’ailleurs dans le respect des lois de la guerre.

Pierre parle à son chef de section : quoi faire ? « Tu peux rester ici, et plus tard rejoindre un maquis, dit le Lieutenant, ou tu peux aller t’engager en Afrique du Nord, où les Français ont repris le combat ; il faut passer par les Pyrénées et l’Espagne, mais il faut attendre le printemps prochain ». En avril 43, voilà notre petit chasseur en route pour Toulouse, avec des papiers en règle fournis par l’Armée de l’armistice.

Sorti de la gare Matabiau, il va sans hésiter consulter un agent de police, auquel il demande poliment comment on fait pour passer en Espagne ! Le brave flic manque de s’étrangler, et lui dit « Tu as eu de la chance d’être tombé sur un patriote, car j’ai bien des collègues qui t’auraient fait jeter en prison ; je connais des gens qui vont t’aider ; en attendant, je te boucle chez moi, car tu es vraiment trop naïf ».

La suite, c’est un obscur voyage en camionnette, de nuit, jusqu’à Lannemezan, un court séjour dans une petite scierie, avec quelques autres candidats à l’évasion, un passeur qui les fait monter jusqu’au col au risque des patrouilles allemandes (sur les évadés de France, voir le site www.effelle.fr/francais-libre/evades-de-france) .

guardia_civilArrivés en haut : « C’est par là les gars, la Guardia civil vous mettra en prison, mais vous en sortirez ». De fait, au premier village, la Guardia civil – très dense pour surveiller le pays à peine sorti de la guerre civile - les repère et les boucle. Mais le garde a besoin de son chef pour engager la procédure, et ils vont donc le chercher au bord d’un petit lac, où il pêche tranquillement.

La suite est par ICI

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