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Journal de bord d'une grand-mère grande lectrice et avide de continuer à apprendre, de ses trois filles et de ses 7 petits-enfants.
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21 février 2008

Affaire terminée, j'arrive ! - Chapitre 13 (2)

 Chapitre 13 – Evasions (2)

ligne_de_d_marcation

Je respire mieux, mais tous les gens du compartiment qui savaient à quoi s'en tenir, poussent un ouf de soulagement, surtout la mère du petit, devenue un instant verte de peur.  Quant à Jo, resté dans le couloir, il avait vu arriver la patrouille et s'était cramponné sur le marchepied, à l'extérieur. Arrivés Gare du Nord, nous passons entre deux haies de soldats, en tenant chacun un enfant par la main. Quelques pas plus loin, le couple avec enfants nous quitte, au grand soulagement de la maman qui nous dit avoir eu très peur pour nous. Il est très tard, le couvre-feu n'est pas loin de sonner. Nous trouvons dans les environs immédiats de la gare un hôtelier qui veut bien nous héberger, mais à la condition que nous soyons partis avant 6heures du matin, à cause du contrôle des fiches que bien entendu nous ne remplissons pas. C'est d'accord, et à l'heure dite, nous revoilà sur les trottoirs. Comme nous avons du temps, nous allons à pied jusqu'à l'Etoile où tout près, rue du Débarcadère N°15, Lulu a une cousine qui habite Nous nous présentons donc chez Jean Billon, qui est le mari de cette cousine. L'accueil est des plus amicaux car Jean fait partie d'un réseau de résistants, et il est tout heureux, ... et nous donc ! Nous ne pouvions pas mieux tomber.

Dès le lendemain, je pars avec Jean à la recherche d'un moyen pour passer la ligne de démarcation. Dans les bistrots où Jean a ses contacts, nous sommes reçus avec joie et curiosité, fêtés, et il en est très fier. Jo, lui, n'est pas très chaud pour ces ballades en ville, qu'il trouve dangereuses, et préfère disputer des belotes à la maison avec la cousine et une de ses copines, tout en prenant le thé . Ayant obtenu par des copains un mot de passe pour une filière, nous partons en train pour Tours,  puis en car pour Reignac.

Le car s’arrête juste devant le bistrot qui m’a été indiqué. J’entre, suivi de Jo, tenant à la main mon petit papier d’identification, que je dois donner à la patronne qui est justement derrière son bar. Au moment de lui adresser la parole, je la vois prise de panique et en même temps j'aperçois dans le miroir derrière elle deux soldats allemands qui nous suivent. Aussitôt je laisse tomber mon petit papier dans l'évier où elle lave les verres. Il disparaît en vitesse dans l'évacuation ....Je n’ai pas le temps de commander un verre, que le chef de patrouille nous demande ce que nous faisons là et d’où nous venons. Je lui raconte une histoire de vélos, que nous devons récupérer, cela ne l’intéresse pas du tout et il nous intime l’ordre de le suivre chez son chef, ce qui est fait en quelques minutes.

Celui-ci, une armoire à glaces d’au moins cent kilos, lieutenant de son état, nous demande nos portefeuilles dans un français à faire braire un âne. Son sous-fifre lui dit alors que ce n’est pas la peine de se fatiguer et que je parle allemand car, chemin faisant, nous avons discuté. Cela lui fait plaisir, et a l'air de le mettre dans de bonnes conditions à notre égard. J'ajoute que ma connaissance de l'allemand me remplit d'admiration pour son pays et son grand chef, qu'il était nécessaire de faire une Grande Europe, etc, etc ... Pendant ce temps, il fouille mon portefeuille, y trouve la photo de ma Lulu avec notre petite Claudie et s'exclame:

- Moi aussi, j'ai une petite fille,
Et aussitôt, il sort aussi une photographie. Je m'aperçois qu'il y est en uniforme de sous-officier. Je saute sur l'occasion pour lui filer un vache de coup de "brosse à reluire", qui le fait doubler de volume.
Le temps passe, et il va bientôt faire nuit. Il me demande, confidentiellement, ce que nous faisons dans les parages.
    - Et bien, je vais tout vous dire, nous travaillons en zone non-occupée et nos femmes sont à Paris depuis l'Armistice, nous ne les avions pas vues depuis et nous avons pris le risque de venir passer quinze jours avec elles, voilà, tout le drame est là ...
Il me demande encore par où nous sommes passés à l'aller, je lui réponds : par Vierzon. Alors il part d'un gros rire et me dit que cela ne l'étonne pas, que c'est une vraie passoire, et nous en rions ensemble. Pendant ce temps là, Jo qui n'a rien compris, se demande ce qui se passe. Au bout d'un moment, le Lieutenant appelle celui qui nous a arrêtés et lui demande :
    - Qu'est-ce qu'on fait de ces deux zèbres ? - On avisera demain, mais il va falloir les loger. J'ai une meilleure idée, envoyez-moi la sentinelle.
Il s'en va, la sentinelle arrive et au garde-à-vous écoute les ordres de son chef :
    - Tu vas prendre le chemin de la forêt et tu les accompagnes jusqu'à la barrière de X., exécution !

Je le remercie chaleureusement et lui promets, si nous devons revenir, de ne pas passer dans son secteur afin de lui éviter des ennuis, nous saluons militairement, et, flanqués de notre cicérone, nous nous enfonçons dans la nuit. Au bout de quelques kilomètres, notre guide, qui est Tchèque, ce que j'ai appris en marchant, voudrait nous laisser aller tous seuls, pour ne pas avoir à faire deux fois la route. Pas du tout, pas du tout, que je lui rétorque, un ordre est un ordre et il faut l'exécuter jusqu'au bout, même si nous devons te porter .... Personnellement, en effet, je redoute une mauvaise rencontre avec une patrouille qui ne serait pas du même avis que son chef. Il fait la gueule, mais alors de ça, on s'en fout ! Je lui propose même de lui porter son fusil, ce qui le fait quand même rigoler.

controleNous marchons encore plus d'une heure et arrivons devant une grande barrière faite de gros troncs d'arbres et haute de deux mètres. Nous l'enjambons facilement et lui souhaitons bon retour, alors que nous, il ne nous reste que quelques centaines de mètres pour trouver un bistrot, avec une envie de courir qui nous démange.

Il est tard. Pas besoin de faire un dessin au patron pour lui dire qui nous sommes. En nous voyant entrer, il nous dit qu'il a compris tout de suite, que nous ne sommes pas les seuls par ici. Il nous restaure et nous loge, et le lendemain en partant, nous indique le Centre Démobilisateur. Nous y allons d'un bon pas et commençons les formalités, il y a pas mal de papiers à remplir. Auparavant, nous sommes passés à la Poste, pour expédier un télégramme chez nous, annoncer la bonne nouvelle. C'est ainsi que nous apprenons que nous sommes à Loches, ce Vendredi 13 février 1942, et je câble à ma petite Lulu : "AFFAIRE TERMINEE, J'ARRIVE"

Tout à ma joie, j'oublie même de lui dire "Bons baisers !"

 

(à suivre)

Commentaires
B
je ne m'en lasse jamais!!!
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